1.15 Les autres travaux de Coulomb
Coulomb se sert de sa balance de torsion pour mesurer la grandeur de charges. Ceci, en mesurant, pour une charge placée sur la boule de sureau mobile B donnée, l'angle de torsion θ requis pour la maintenir à une distance donnée de l'autre boule A qui a reçu la charge à mesurer.
Il invente ce qu'il appelle le plan d'épreuve: c'est une petite surface plane métallique flexible placée sur un manche isolant. Il remarque que, s'il appose sur une surface chargée son plan d'épreuve, celui-ci recueille une certaine charge. Il peut maintenant la transporter, une fois prélevée de l'objet électrique étudié, et la placer comme charge A dans sa balance de torsion. Et ainsi, la mesurer.
Il décide de vérifier que la charge d'une sphère métallique est bien superficielle. Pour ce faire, il construit deux hémisphères métalliques, attachés chacun à un manche isolant, qu'il peut placer sur la sphère isolée de telle sorte qu'ils la recouvrent parfaitement en la touchant en tout point.
Il débute en chargeant sa sphère à l'aide de sa machine électrostatique. Il vérifie, à l'aide de son plan d'épreuve, que la sphère métallique isolée est bien chargée: il trouve l'angle de torsion requis pour maintenir A et B à une distance choisie. Il place ses deux hémisphères en contact complet avec la sphère. Ce sont leurs surfaces externes qui constituent la surface externe de l'ensemble conducteur. Il enlève maintenant les deux hémisphères. Il touche la sphère conductrice avec son plan d'épreuve et le place dans sa balance de torsion. Il remarque que ce dernier ne porte pas de charge. Il touche la surface externe de ses hémisphères avec son plan d'épreuve: il remarque qu'il porte autant de charges que la première fois comme il doit tordre son fil du même angle pour maintenir la même distance. La charge est donc bien superficielle et dans le cas des conducteurs, et dans le cas des isolants.
Il vérifie d'ailleurs que la surface interne d'une sphère creuse n'a pas de charge: il va toucher la surface interne d'une sphère creuse munie d'une petite ouverture en son sommet avec son plan d'épreuve; puis en mesure la charge avec sa balance de torsion électrique: il trouve que son plan d'épreuve ne porte aucune charge. Il n'en a pas collecté de la surface interne qu'il a touchée parce que celle-ci n'en porte pas.
Puisque la petite surface métallique A du plan d'épreuve est accolée momentanément sur la surface du corps chargé, il s'ensuit qu'elle devient en quelque sorte la surface externe locale de ce dernier et donc qu'elle ramasse toute la charge q trouvée sur la surface A du conducteur avec laquelle elle est en contact.
Le plan d'épreuve se trouve donc à collecter la charge q qui se trouvait sur sa surface A . Plus la charge collectée q est grande sur cette surface A , plus la charge par unité de surface σ , dite charge superficielle, notée à l'aide de la lettre grecque sigma minuscule, définie par ce rapport q sur A , est grande.
Il remarque que la densité superficielle de charge est la même partout sur une sphère, mais qu'elle varie si le corps est, par exemple, ellipsoïde: la densité superficielle augmente quand le rayon de courbure diminue. Plus le rayon de courbure est faible donc, plus les charges superficielles sont serrées. C'est donc à la pointe d'un conducteur que les charges vont aller se concentrer; il n'est alors guère étonnant que la pointe soit le point de départ ou d'arrivée du fluide électrique, comme l'avait montré Franklin.
Comment trouver le champ électrique résultant dû à une densité superficielle de charges? La loi de Coulomb, avons-nous vu, ne s'applique qu'à des charges ponctuelles. Nous ne pouvons donc pas l'utiliser sans modifications. Mais nous pouvons découper mentalement la surface chargée en un grand nombre de petites dalles chargées, chacune de surface infime, chacune portant une charge infime que nous notons dq (le d devant le q indique que la charge q est diablement petite). Cette petite dalle est, à toute fin pratique, ponctuelle. Son champ est donc celui d'une charge ponctuelle; mais comme la charge est infime, son champ dE l'est également. Notre équation (1.12.1) devient donc
Le champ résultant E est donné en faisant la somme des champs infimes de chaque charge infime constituant la charge superficielle totale. Cette somme, d'un nombre infini de termes infimes, est une intégrale, notée par un signe qui ressemble à la lettre s allongée
Nous n'allons pas chercher ici à calculer les champs électriques avec cette méthode, comme cela ne nous sera pas nécessaire par la suite.