1.2 La contribution de Gilbert au magnétisme

 

            William Gilbert (1540-1603) entreprend de passer en revue toutes les connaissances des Anciens sur l'électricité et le magnétisme, de les vérifier et de les compléter. Il publie en 1600 De Magnete, le fruit de ses recherches. Il y reprend les expériences de Peregrinus sur le globe de magnétite. Il appelle pôle nord le pôle du globe aimanté qui pointe librement vers le nord de la Terre, et pôle sud celui du globe aimanté qui pointe vers le pôle sud de la Terre. Il fait de même avec les pôles de l'aiguille de fer aimantée. Il remarque que les pôles des aimants ne sont pas des points mais des régions plus ou moins étendues.

 

            Gilbert remarque de plus que les pôles nord de deux aimants se repoussent, comme d'ailleurs leurs pôles sud, alors que le pôle nord de l'un attire le pôle sud de l'autre, expliquant ainsi leur mouvement l'un vers l'autre. Il remarque de plus que l'attraction entre des pôles opposés augmente avec leur proximité.

 

            Gilbert argumente que si le pôle nord d'un aimant pointe vers le nord géographique de la Terre, c'est que ce point de la Terre l'attire. Or le pôle nord d'un aimant n'est attiré que par le pôle sud d'un autre aimant. Il s'ensuit que la Terre doit agir comme un énorme aimant, avec son pôle sud magnétique à la position de son pôle nord géographique. Tout comme son globe de magnétite agit sur le compas qu'il place à sa surface, la Terre agit sur un compas et en fait pointer le pôle nord vers son nord géographique.

 

            Gilbert remarque de plus qu'une aiguille aimantée, originellement avec un pôle nord à une extrémité et un pôle sud à l'autre, forme deux aimants complets une fois brisée: les deux pôles manquants apparaissent alors. Tout comme deux aiguilles aimantées semblent ne former qu'un seul aimant lorsque placées bout à bout, avec un pôle nord en contact avec un pôle sud.

 

            Il remarque que tous les corps attirés par les aimants possèdent du fer, comme d'ailleurs la magnétite, qui est un minerai de fer déjà aimanté. Il remarque que certains fers font de bons aimants permanents: les aciers, par exemple. Ces fers sont dits aigres. Les autres fers, qui ne font pas de bons aimants permanents, sont dits doux. Les fers, doux et aigres, sont attirés par les aimants, naturels et artificiels.

 

fig14a.gif    Chaînes aimantées

            Il remarque que tout aimant a, en quelque sorte, une zone d'influence qui s'étend à quelque distance de lui. Si un fer se trouve dans cette zone, il va être attiré vers l'aimant. Il remarque que le fer originellement non aimanté est toujours attiré, contrairement au cas d'un aimant placé dans cette même zone qui pourrait être repoussé si ce sont des pôles semblables qui sont les plus proches. Puisque ce sont des pôles magnétiques qui s'attirent ou se repoussent, il s'ensuit que le fer, maintenant dans la zone d'influence de l'aimant, a été aimanté par lui, de telle sorte qu'il lui présente un pôle non semblable. Il explique ainsi les chaînes de clous de fer doux qui traînent à la suite d'un aimant: chacun est aimanté par le précédent, mais un peu plus faiblement. Il remarque que la zone d'influence de l'ensemble est bien plus grande que la zone d'influence de l'aimant original. Cet effet est mentionné, sans essai d'explication, par Platon (428-348), dans son Ion, où il note qu'Euripide (480-406) nomme la pierre aimantée originale magnétique.

 

fig15a.gif

            Si le fer, aimanté une fois placé dans la zone d'influence d'un autre aimant, est doux, il va perdre son aimantation une fois l'aimant enlevé. Mais s'il est aigre, il va conserver une partie de son aimantation. Les deux fers, doux et aigres, attirent donc de la limaille de fer quand ils sont dans la zone d'influence d'un aimant (cas A). Mais, une fois celui-ci enlevé (cas B), le fer doux n'attire plus la limaille, alors que le fer aigre continue de l'attirer, démontrant qu'il agit encore comme un aimant. Ce qui démontre que le fer aigre peut faire un aimant permanent, contrairement au fer doux.

 

            Il remarque de plus que placer des capuchons de fer doux contre la magnétite en augmente la capacité de soulever des masses de fer, ce qu'il appelle armer la magnétite.