11.1 La contribution de Hall

 

a) expérience originale

 

fig1.gifMontage de Hall

            En 1879, Edwin Herbert Hall (1855-1938) fait circuler un courant I dans le sens de la longueur L dans une languette métallique conductrice. Il la place dans un champ magnétique B dont le sens est celui de son épaisseur: le fluide électrique dans la languette doit alors subir une force magnétique Fm donnée par la force magnétique d'Ampère,

fig2.gifRésultat escompté

notre équation (4.2.1). Il est alors raisonnable de supposer que le fluide devrait être comprimé par cette force sur un côté de la languette. Si cela est le cas, la résistance R apparente de la languette dans ce champ donnée par notre équation (5.1.4)

 

devrait augmenter puisque la section A réelle dans laquelle circule le fluide devrait diminuer. Et ce, d'autant plus que le produit du courant I et du champ magnétique B est grand.

 

            Hall mesure la résistance R de sa languette conductrice à l'aide d'un pont de Wheatstone. Il trouve que la résistance ne varie pas avec le champ magnétique. Il se doit donc de conclure que le fluide électrique n'est pas vraiment comprimé sur un côté de la languette par la force magnétique qu'il subit.

 

            Pourtant le fluide électrique subit l'action du champ électrique E causé par la différence de potentiel VΩ entre les deux extrémités de la languette de longueur L , champ électrique E qui, avons-nous vu dans notre chapitre cinq, est constant sur toute la longueur L de cette languette homogène.

 

b) nouvelle hypothèse et résultats escomptés

 

            Le fluide électrique subit donc l'action d'une force électrique Fe . Il doit également subir l'action d'une force magnétique Fm puisque la languette la subit. Après discussion avec Rowland, Hall se demande si une force électrique Fe

égale et opposée à la force magnétique Fm n'a pas été induite dans sa languette par cette force Fm . Cette force électrique Fe empêcherait alors la compression du fluide électrique dans une section réduite de la languette, ce qui expliquerait que la résistance de la languette ne change pas.

 

            Cette force électrique Fe serait due à un champ électrique induit Ei dont la direction est perpendiculaire au champ magnétique B et au courant I . Ce champ électrique induit Ei serait probablement constant sur toute la largeur a de sa languette, causant ainsi une différence de potentiel VH entre deux points situés sur une droite dans le sens de la largeur. Sinon, le champ serait au moins proportionnel à cette différence de potentiel.

 

            La force électrique Fe en question demanderait donc l'existence d'une différence de potentiel VH à laquelle elle serait proportionnelle. Or la force magnétique Fm est directement proportionnelle au produit du champ B par le courant I . Il s'ensuit de cet argument que la tension VH qui serait trouvée dans le sens de la largeur de la languette

serait proportionnelle au produit du champ magnétique B par le courant I .

 

c) nouvelle expérience

 

            Hall tente l'expérience sans succès avec une languette de cuivre mince, de 0,35 mm d'épaisseur environ. Il n'abandonne pas pour autant. Il sait en effet que, pour un même courant, le mouvement de fluide électrique doit être d'autant plus rapide que la section du conducteur est faible. Si l'effet est proportionnel à la vitesse du fluide, il se pourrait que la tension induite dans le cas de sa languette soit trop faible pour être mesurée.

 

            Aussi Hall décide-t-il d'entreprendre l'expérience avec une feuille d'or excessivement mince. Il la place dans le champ magnétique d'un électro-aimant et obtient alors la relation escomptée. La tension VH perpendiculaire au courant et qui est due à l'action du champ magnétique, tension qu'il est le premier à mesurer, porte son nom: c'est la tension de Hall.

 

fig3.gif

Hall place sa feuille d'or F sur une plaque de verre E . Deux blocs de bronze B en délimitent la longueur à 55 mm; sa largeur est, elle, de 20 mm et son épaisseur, de 35 nm. Sa résistance est de 1,92 Ω par l'équation (11.1.2) puisque la résistivité de l'or est de 2,44⋅10-8 Ωm.

 

Lorsqu'un courant de 250 mA passe dans la feuille F dans le sens de sa longueur, une tension de Ohm de 1,92 Ω fois 0,25 A, soit de 0,48 V apparaît entre les blocs de bronze B . Une tension perpendiculaire au courant de 0,18 mV apparaît si le champ magnétique est de 0,35 T, et une de 0,36 mV apparaît si le champ magnétique est de 0,7 T. Si le courant est doublé à 500 mA, la tension de Ohm passe à 0,96 V et celle perpendiculaire au courant, à 0,72 mV pour un champ magnétique de 0,7 T.

 

            La raison pour laquelle la résistance R n'est pas réduite par le champ magnétique B est donc la création d'un champ électrique induit Ei perpendiculaire au courant I . Et cette tension induite est d'autant plus grande que le courant I circule rapidement dans le conducteur.