CHAPITRE CINQ
LOIS DE KIRCHHOFF
Nous avons vu dans notre chapitre trois les concepts de tension et de courant électriques introduits par Volta. Nous y avons vu que la tension se mesure à l'aide de l'électroscope et que le courant se mesure à l'aide d'une boussole amenée, par torsion, à angle droit avec le champ magnétique causé par le courant à mesurer. Nous avons vu par la suite de meilleures méthodes pour mesurer le courant électrique.
Nous avons également vu dans notre chapitre trois le concept de force électromotrice, soit la tension électrique qu'a une pile lorsque celle-ci ne conduit pas, concept introduit, encore une fois, par Volta. Mais qu'arrive-t-il exactement quand la pile électrique conduit?
5.1 La contribution d'Ohm
Nous avons vu au chapitre trois qu'Ampère avait remarqué qu'il n'y a un courant dans un montage électrique que si celui-ci forme un circuit; et qu'alors le courant est le même partout dans la boucle.
Le courant produit par une pile électrique ne dépend pas seulement de sa force électromotrice mais également du circuit électrique placé à ses bornes, avait-on remarqué très rapidement à l'aide du galvanomètre de Schweigger. Mais comment, voilà qui était loin d'être clair.
a) montage de Ohm et ses résultats
Georg Simon Ohm (1789-1854) cherche à répondre à cette question. Il trouve que, dans certains cas, le courant augmente avec le nombre de piles électriques placées en série, mais pas toujours. Et il doit faire face aux problèmes relatifs aux piles chimiques. Poggendorff lui suggère alors d'utiliser la pile thermo-électrique inventée, comme nous avons vu, par Seebeck en 1821. Il place donc une jonction de celle-ci dans de l'eau bouillante (température de 100 °C) et l'autre, dans de l'eau glacée (température de 0 °C). Il lui est facile de maintenir ces températures constantes et donc de maintenir constante la force électromotrice de sa pile.
En 1826, il place un fil, de cuivre par exemple, homogène, de section A et de longueur L aux bornes de sa pile, de telle sorte que le courant circule vers le nord. Il peut maintenant mesurer le champ magnétique dû au courant I qui le traverse en mesurant l'angle de torsion supplémentaire θ requis pour maintenir le boussole à angle droit avec la somme des champs magnétiques terrestre et dû au courant.
Il reprend cette même expérience avec deux piles thermo-électriques identiques placées en série (soit à la queue-leu-leu): la tension aux bornes de l'ensemble doit être alors deux fois celle d'une seule. Il remarque que le courant obtenu est deux fois plus grand. Et trois fois plus grand s'il place trois de ces piles identiques en série. Le courant I qui circule dans le fil est donc proportionnel à la tension électrique T
qui se trouve à ses bornes, tension qu'il peut mesurer avec un électroscope.
Il refait l'expérience avec un fil homogène deux fois plus long. Il trouve un courant deux fois plus faible, pour une force électromotrice constante. Et trois fois plus faible pour un fil de longueur L trois fois plus grande. Et s'il fait l'expérience avec un fil deux fois plus fin, c'est-à-dire de section A deux fois plus faible, il trouve un courant deux fois plus faible. Et s'il refait l'expérience avec un fil de section trois fois plus faible, il trouve un courant trois fois plus faible. Le courant trouvé, pour une force électromotrice donnée constante, dépend donc des dimensions du fil: le courant I
est d'autant plus faible que le fil est long et qu'il a une faible section, et d'autant plus grand que la tension à ses bornes est grande.
Il remarque aussi que deux fils homogènes de même section et de même longueur ne sont pas traversés par un même courant pour une même force électromotrice: le type de conducteur utilisé est important. Il remarque qu'un fil de chanvre laisse passer le courant bien mal comparé à un fil de cuivre de mêmes dimensions: c'est que sa résistivité ρ (lettre rho minuscule) est plus grande. Le courant I qui circule dans un fil de longueur L , de section A et de résistivité ρ
dépend de la tension électrique T à ses bornes. Il remarque de plus que la résistivité d'un matériau dépend de sa température; certains conducteurs, comme les métaux, voient leur résistivité augmenter avec leur température; alors que le chanvre, par exemple, voit sa résistivité baisser avec l'augmentation de sa température.
b) résistance
La résistance R d'un fil, remarque-t-il, est ce qui détermine le courant pour une tension donnée. Celle-ci est donc l'inverse du terme devant la tension dans notre dernière équation. Elle est
d'autant plus grande qu'il est long, que sa section est faible et que sa résistivité est grande.
Il s'ensuit que la tension électrique T aux bornes d'un fil conducteur est reliée au courant qui y circule
par sa résistance R . Ceci constitue la loi d'Ohm. Il vérifie que le courant s'écoule de fait du point où la tension électrique est la plus grande à celui où la tension est la plus faible. La tension la plus grande, considérée de polarité positive, est représentée par le signe positif encerclé, et l'autre, considérée de polarité négative, par le signe négatif encerclé. Le courant dans une résistance va toujours de la tension la plus grande à la tension la plus faible (de la polarité positive à la polarité négative). La résistance est représentée symboliquement par une ligne en zig-zag.
c) son interprétation
Ohm cherche maintenant à faire sens de ses résultats. Il sait que le fluide électrique n'est trouvé qu'à la surface des conducteurs. Il semble donc de cela que celui-ci ne devrait s'écouler qu'à leur surface. Or voilà que la résistance d'un fil conducteur dépend de sa section: il faut donc que le courant circule, non pas seulement sur la surface du conducteur, mais uniformément dans toute sa section. (Nous avons déjà tenu compte de ce résultat dans notre chapitre précédent.)
Le baron Joseph Fourier (1768-1830) avait montré en 1822 comment les barres de métal conduisent la chaleur et avait obtenu une équation similaire à celle trouvée expérimentalement par Ohm. Ce dernier, s'inspirant de ce travail, suggère que, comme le mouvement de chaleur à travers la barre est dû à ce que la quantité de chaleur est plus grande à une extrémité de la barre qu'à l'autre, le mouvement de fluide électrique est dû à ce que la densité de fluide électrique est plus grande à une extrémité de fil conducteur qu'à l'autre; que la tension de Volta représente cette densité plus grande de charges (après tout, Volta n'avait-il pas montré que la tension électrique est proportionnelle au nombre de charges?).
d) représentation symbolique d’une pile
Ohm remarque également que la tension T aux bornes du fil conducteur de résistance R, placé directement aux bornes d'une pile, varie selon la valeur de sa résistance: elle est toujours plus faible que sa force électromotrice ℰ mesurée, avons-nous vu, lorsque la pile est débranchée. Il comprend que cela est dû au fait que la pile est résistive: sa tension nette T est réduite par sa résistance interne Ri . Cette résistance est représentée ici symboliquement juste à côté du symbole de la force électromotrice de la pile. L'ensemble de deux barres verticales inégales, la plus longue représentant la borne positive et l'autre, la borne négative, ne représente dans cet ouvrage que la force électromotrice ℰ de la pile comme sa résistance interne Ri est représentée, explicitement, juste à côté. (Cette façon de faire n'est pas universelle.)
5.2 Le potentiomètre
a) autres conséquences du travail de Ohm
Une conséquence du travail d'Ohm est que la tension varie le long d'un fil conducteur parcouru par un courant. Aussi la différence de tension entre une extrémité d'un fil, homogène, parcouru par un courant, et un autre point du fil est d'autant plus grande que ce dernier s'éloigne du premier. Une autre conséquence est que la tension à chacune des deux bornes d'un fil conducteur doit être la même s'il n'y circule pas de courant. Ce sont ces conséquences que va mettre à profit Poggendorff en 1841 dans un montage qui prendra beaucoup plus tard le nom de potentiomètre, et qui lui permet de trouver la valeur d'une tension en fonction de la force électromotrice d'une pile étalon.
b) représentation symbolique du galvanomètre
Ce montage comprend un galvanomètre, représenté symboliquement par un cercle (un cadran) dans lequel est placé la lettre G (pour galvanomètre). Celui-ci, quel que soit le modèle utilisé, comprend une bobine de fil conducteur dans lequel peut circuler un courant. Il s'ensuit par ce que nous venons de voir qu'il a une résistance. Cette résistance interne du galvanomètre, notée RG , est représentée ici symboliquement juste à l'extérieur du cercle. Le cercle, donc, ne représente dans cet ouvrage que le fait qu'il s'agit d'un appareil de mesure comme sa résistance interne est représentée, explicitement, juste à côté. (Cette façon de faire n'est pas universelle.)
c) mesure de la tension aux bornes du potentiomètre
Poggendorff monte un premier circuit qui comprend une pile, de force électromotrice ℰ , de résistance interne Ri , et un long fil homogène, dont les extrémités sont a et c . Il place ensuite sur ce long fil dénudé un curseur conducteur, représenté symboliquement par une flèche. Ce curseur est relié à la borne d de son galvanomètre. Il relie, avec des fils conducteurs, l'extrémité c du long fil homogène à la borne h de son potentiomètre à l'aide du commutateur placé en position 1 . L'autre borne e de son galvanomètre est reliée à l'autre borne i de son potentiomètre. Il relie les bornes h et i de son potentiomètre aux points d'un circuit externe, points dont il cherche à mesurer la différence de tension Tih . La borne i doit être à une tension supérieure à celle de la borne h pour que l'appareil fonctionne.
Poggendorff ajuste la position du curseur en b de telle sorte que le courant soit nul dans son galvanomètre. En quel cas il n'y a pas de différence de tension entre les points b et i : ces deux points ont donc même tension. Le courant I qui circule, de la pile de force électromotrice ℰ , traverse alors tout le fil conducteur, dont les extrémités sont a et c , puisqu'il n'y a pas de courant qui circule dans le galvanomètre. Et il ne peut pas y en avoir non plus dans le fil qui relie les points c et h . En quel cas il n'y a pas de différence de tension entre les points c et h : ils ont même tension. La différence de tension entre les points i et h est donc la même qu'entre les points b et c , ce qui donne
puisque la différence de tension entre les points b et c dépend du courant I et de la longueur de fil Lbc entre ces deux points.
d) étalonnage du potentiomètre
Poggendorff place le commutateur en position 2 : la borne c est maintenant reliée à la borne f d'une pile étalon ℰe , la borne g de celle-ci étant déjà reliée à la borne e du galvanomètre. Il ajuste, derechef, la position du curseur, cette fois en k , de telle sorte que le courant soit à nouveau nul dans son galvanomètre. En quel cas il n'y a pas de courant entre les points k et g , g et f , et f et c . Il n'y a donc pas de différence de tension entre les points k et g : ils ont la même. Et il n'y a pas de différence de tension entre les points c et f : ils ont la même. Le courant I qui circule de la pile de force électromotrice ℰ traverse alors tout le fil conducteur, dont les extrémités sont a et c , puisqu'il n'y a pas de courant qui circule dans le galvanomètre. Le circuit comprenant le long fil et la pile est le même dans les deux cas. La différence de tension entre les points g et f est donc la même qu'entre les points k et c , ce qui donne
puisque la différence de tension entre les points k et c dépend du courant I et de la longueur de fil Lkc entre ces deux points.
e) calcul de la tension à partir des mesures
Le rapport des différence de tensions entre les points i et h , d'une part, et g et f , d'autre part, donne
selon nos équations (5.2.1) et (5.2.2) puisque le courant I , le même dans les deux cas, parcourt un fil homogène de même section (ce qui fait que la constante de proportionnalité est la même dans nos deux équations).
La différence de tension entre les points g et f est celle aux bornes de la pile étalon, soit ℰe puisque le courant est nul dans cette dernière. Isoler la différence de tension entre les points i et h
permet d'écrire cette dernière en termes de la force électromotrice de la pile étalon et des rapports des longueurs entre le curseur et le point c .
f) représentation symbolique du potentiomètre
Le potentiomètre se trouve donc à mesurer la tension électrique à ses bornes quand il n'y a pas de courant qui circule à travers celles-ci. C'est donc qu'il apparaît alors comme une résistance infinie, selon notre équation (5.1.5). Le fait que le potentiomètre est un instrument de mesure est représenté symboliquement par un cercle, dans lequel se trouve la lettre Π (lettre pi majuscule) (pour potentiomètre); le fait qu'il a une résistance interne Rπ , par le symbole de celle-ci.
5.3 Le pont de Wheatstone
En 1842, sir Charles Wheatstone (1802-1875) profite lui-aussi du travail d'Ohm, mais pour mesurer non pas des tensions, mais des résistances. Son circuit original comprend, comme celui de Poggendorff, une pile et un long fil, dont les extrémités sont a et c . Il relie à la borne a une extrémité d'une résistance étalon Re , qui lui sert de référence, et à la borne c une borne d'une résistance R dont il cherche à comparer la valeur avec l'autre. Il relie les bornes libres des résistances étalon et inconnue ensemble, au point d , avec une des deux bornes de son galvanomètre. L'autre borne de ce dernier est reliée à un curseur qui glisse sur le fil conducteur dont les extrémités sont a et c . Sir Charles nomme en 1843 rhéostat le long fil dont les extrémités sont a et c muni d'un curseur. Le pont proprement dit comprend donc une pile, un rhéostat et un galvanomètre. Y sont reliées deux résistances externes, celle de référence, et celle à mesurer.
Sir Charles place son curseur en b de telle sorte que le courant soit nul dans son galvanomètre - tout comme fait Poggendorff. En quel cas la tension est la même aux bornes b et d puisqu’il n'y a pas de courant dans la résistance RG . De plus, le courant I2 est le même dans tout le fil conducteur qui s'étend des points a à c puisqu'il n'y a pas de courant dans le galvanomètre; et le courant I1 est le même dans les résistances étalon et inconnue pour la même raison.
Il s'ensuit que la différence de tension entre les points d et c est la même
qu'entre les points b et c ; et que la différence de tension entre les points a et d est la même
qu'entre les points a et b .
Le rapport des termes de gauche et des termes de droite de ces deux dernières équations devient
qui peut se réécrire comme
puisque le rapport des différences de tension du terme de gauche est dans le rapport des résistances parcourues par un même courant, d'une part, et le rapport des tensions du terme de droite est dans le rapport des longueurs du fil entre les points b et c et a et b parcourues par un même courant, d'autre part. La résistance R inconnue est donc
donnée en termes de la résistance étalon Re et de longueurs de fil conducteur du rhéostat.
5.4 Les lois de Kirchhoff
Ce travail de sir Charles Wheatstone et de Poggendorff amène Robert Gustav Kirchhoff (1824-1887) à énoncer des lois générales pour des réseaux électriques. Ces lois sont, en fait, déjà sous-entendues dans leurs travaux.
La première loi de Kirchhoff stipule que la somme des courants électriques qui se rencontrent à un embranchement doit être nulle. Ou, dit autrement, il doit y avoir autant de fluide électrique qui arrive en un point, en un embranchement, qu'il doit y en avoir qui le quitte.
Si le point considéré n'est pas un embranchement, le courant qui y arrive étant le même que celui qui le quitte, il s'ensuit que le courant est constant sur la partie du circuit entre deux embranchements; ce qu'avait déjà remarqué Ampère dans le cas d'un circuit électrique sans embranchements. Et si, comme dans le cas du point de Wheatstone, le courant est nul dans la branche du galvanomètre, il s'ensuit que le courant dans la branche qui va des points a à b est le même que dans la branche qui va des points de b à c ; et que si le premier arrive à l'embranchement du point b , le second le quitte. Mais il reste que cette loi est une généralisation des cas examinés ici.
La seconde loi de Kirchhoff stipule que la somme des différences de tension, en tenant compte des polarités, est nulle le long d'un circuit, soit un trajet où le point d'arrivée coïncide avec celui de départ. Ceci, parce qu'il n'y a pas de différence de tension entre un point et lui-même. Nous avons, en fait, utilisé ce principe lorsque nous avons dit que, dans le point de Wheatstone, la différence de tension est la même entre les points d et c d'une part et b et c d'autre part puisqu'il n'y a pas de différence de tension entre les points d et b . Il reste que cette loi est une généralisation des cas examinés ici. Il nous faut considérer la différence de tension comme négative si les polarités aux bornes en question vont du + au - ; et positive, dans le cas contraire.
Kirchhoff ne se contente pas des cas des réseaux électriques; il désire en plus examiner le cas de la répartition du courant entre les électrodes d'un bac d'électrolyse, et étend alors la théorie d'Ohm à ce type de situation; ce que nous n'examinerons pas ici.
5.5 La loi de Joule
a) échauffement d’une résistance
En 1841, James Prescott Joule (1818-1889) place un fil conducteur dans un calorimètre. Ce dernier est essentiellement un thermos, rempli d'eau, et muni d'un thermomètre. Il fait passer un courant donné dans le fil; il remarque un certain taux d'échauffement du thermomètre. Ce taux d'échauffement est dû au fait, déjà connu depuis plus d'un siècle, que les fils conducteurs chauffent lorsqu'il y passe un courant électrique. Le taux d'échauffement est proportionnel à la puissance produite dans le calorimètre, ce qui veut dire, dans notre cas, produite par le fil conducteur. Il remarque que la puissance dégagée P
est proportionnelle au carré de l'intensité du courant I qui traverse son fil.
Il reprend son expérience avec un fil de résistance R double. Il remarque que la puissance alors dégagée est
proportionnelle à la résistance du fil lorsque le courant est le même d'un fil à l'autre.
La chaleur est alors mesurée en calories; Joule peut donc mesurer la quantité de calories produite par son fil conducteur lorsqu'il y circule un courant donné. Il semble donc qu'il y a une quantité qui est conservée lors de sa transformation, d'électrique en chaleur. Et Faraday avait déjà remarqué en 1833 que la pile électrique produit d'autant plus d'électricité qu'il s'y passe un grand nombre de réactions chimiques. Il y a donc, là également, une quantité qui semble être conservée lors de sa transformation, de chimique à électrique.
b) équivalent mécanique de la calorie
Dans le cas des énergies mécaniques, cinétique et potentielle, leur somme est conservée, sait-on depuis déjà un long moment. Et il est connu depuis des siècles que la chaleur peut être produite par frottement; or la force de frottement est une force mécanique. En 1843, Joule produit une expérience similaire où il mesure la chaleur dégagée par une force de frottement mécanique donnée appliquée de telle sorte que le travail mécanique produit est calculable. Il montre alors que la quantité de chaleur produite est proportionnelle au travail mécanique fait. C'est donc qu'il y a conservation de l'énergie lorsqu'elle se transforme, de mécanique, en calorifique. La chaleur est une forme d'énergie. Et il calcule l'équivalent mécanique de la calorie.
Joule est donc, en 1843, en mesure de déterminer la puissance, dégagée par un fil de résistance R parcouru par un courant I , non plus seulement en termes de chaleur dégagée par intervalle de temps, en calories par seconde, mais en termes de travail mécanique effectué par intervalle de temps, en watts, l'unité de puissance mécanique ainsi nommée à cause du travail de James Watt (1736-1819) sur la machine à vapeur.
c) transformations des énergies
En 1847, Hermann Ludwig Ferdinand von Helmholtz (1821-1894) met de l'avant, comme hypothèse, le principe universel de conservation de l'énergie. L'énergie chimique peut se transformer en énergie électrique (dans le cas de la pile électrique) et vice-versa (dans le cas de l'électrolyse); et l'énergie chimique en énergie thermique; et l'énergie électrique en énergie thermique (dans le cas de l'effet Joule); et l'énergie mécanique en énergie thermique; et l'énergie mécanique en énergie électrique (comme nous verrons bientôt); et l'énergie électrique en énergie mécanique (comme dans le cas de la roue de Barlow). Et, de dire von Helmholtz, l'énergie totale est toujours conservée. Ce qui était loin d'être prouvé.
5.6 Potentiel électrique et courant
a) loi d’Ohm revue
En 1848, Rudolf Hermann Kohlrausch (1809-1858) décide de remplacer son électroscope par un électromètre. Les premiers modèles d'électromètre à plateaux, par exemple, datent de 1834. Rappelons-nous que cet appareil mesure la différence de potentiel électrique à ses bornes. Et que le potentiel électrique est cette fonction, clairement définie dans notre chapitre deux, reliée au champ électrique et introduite par Poisson pour étudier l'électrostatique. Alors que Volta avait utilisé l'électroscope pour son étude des circuits électriques.
Kohlrausch mesure la différence entre les potentiels V des points extrêmes d'un fil conducteur. Il trouve que cette différence est proportionnelle au courant, exactement comme avait trouvé Ohm dans le cas de la tension mesurée entre les mêmes extrémités avec son électroscope. La différence de potentiel et la différence de tension sont donc toutes deux proportionnelles au courant; et, montre-t-il, proportionnelles à la résistance. Si V dénote maintenant la différence entre les potentiels des bornes de la résistance, nous avons
où R est la pente. L'unité de résistance peut être introduite en 1881: des V / A , comme la résistance est le quotient de la différence de potentiel sur le courant. Ce rapport porte le nom d'ohm, noté Ω (la lettre grecque oméga majuscule), vu le travail de ce dernier sur ce sujet.
Ohm avait déjà trouvé que la résistance d'un fil est donnée
en termes de la résistivité du matériau qui compose le fil, de sa longueur et de sa section. La résistivité s'exprime en Ω ⋅ m 2 / m , soit en Ω ⋅ m . Kohlrausch est maintenant en mesure de calculer la résistivité de plusieurs matériaux.
Le tableau de la page suivante donne la résistivité d'un certain nombre de conducteurs, éléments purs ou alliages, à la température de 20 °C. Certains de ces alliages sont assez récents. Le manganin, introduit vers 1902, comprend 84% de cuivre, 12% de manganèse et 4% de nickel, et est utilisé pour fabriquer des bobines de résistances; le constantan, introduit vers 1900, comprend 60% de cuivre et 40% de nickel et porte ce nom parce que sa résistivité ne varie guère avec la température; le nichrome, introduit vers 1932, comprend 62% de nickel, 15% de chrome et 23% de fer et ne s'oxyde pas.
b) loi de Joule revue
Une fois la valeur d'une résistance mesurée à l'aide de l'électromètre et du galvanomètre, les résultats de Joule peuvent être repris. La puissance P , dissipée par une résistance de valeur connue R , est trouvée égale à
lorsque parcourue par un courant I . Cette relation expérimentale est dite loi de Joule. Evidemment, elle peut être réécrite comme
Matériau |
Résistivité (10 - 8 Ωm) |
argent |
1,6 |
cuivre |
1,7 |
or |
2,4 |
aluminium |
2,8 |
tungstène |
5,6 |
zinc |
5,8 |
bronze |
7,0 |
nickel |
7,8 |
fer |
10 |
plomb |
22 |
manganin |
44 |
constantan |
49 |
nichrome |
100 |
à l'aide de notre équation (5.6.1).
c) équivalence potentiel-tension
Kirchhoff examine en 1849 les résultats de Kohlrausch. Il saisit que la tension électrique, mesurée à l'aide de l'électroscope, n'est rien d'autre que le potentiel électrique de Poisson; que la raison pour laquelle la feuille d'or de l'électroscope dévie de la verticale est la même raison pour laquelle le disque mobile est attiré par l'autre plateau dans le cas de l'électromètre. Il s'ensuit que tension et potentiel électriques sont une seule et même chose mesurée différemment. Aussi utiliserons-nous ces deux termes indifféremment à partir de maintenant.
L'unité de la tension, et donc du potentiel électrique, est, avons-nous vu, le volt. Nous comprenons maintenant pourquoi il porte ce nom: c'est Volta qui le premier introduisit le concept de tension électrique.
Kirchhoff reformule sa seconde loi plus précisement ainsi: puisque la différence de potentiel entre un point et lui-même est nulle, la somme des différences de potentiel électrique le long d'un circuit est nulle, tenant bien compte qu'une perte de potentiel est négative alors qu'un gain est positif.
d) interprétation de la loi de Joule
Il sait de plus qu'une charge infime dQ voit son énergie potentielle changer par une valeur infime dU donnée par
lorsque son potentiel change par une valeur V . Or le courant électrique I est justement dû à un "mouvement" d'une charge infime dQ lors d'une durée infime dt . Divisant l'équation précédente par cette durée infime, il obtient
que le taux de changement de l'énergie potentielle électrique est égal à la puissance électrique. La loi de Joule est donc maintenant établie sur une base théorique.
E) interprétation de la loi d’Ohm
Si, argumente Kirchhoff, le fil homogène, de résistivité ρ, de longueur L et de section A a une différence de potentiel V à ses bornes, celle-ci doit être due à un champ électrique E constant dans le fil sur toute sa longueur. Constant parce que le fil est justement homogène; et de l'extrémité du fil où le potentiel est le plus grand vers l'extrémité du fil où le potentiel est le plus petit. Il s'ensuit que
à l'aide des équations (5.6.1) et (5.6.2). Isoler le champ électrique donne
réécrit en tenant compte que courant et champ électriques sont vraiment des vecteurs, et que dans les deux cas, ils vont du potentiel le plus élevé au plus bas.
5.7 Chauffage électrique
a) types d’éléments chauffants électriques
T (°C) |
Effet sur l'oeil |
530 |
à peine visible à l'obscurité |
650 |
à peine visible à la lumière |
760 |
vu rouge mat |
870 |
vu rouge vif |
980 |
vu rouge brillant |
Le fait qu'une résistance qui chauffe transforme finalement une énergie électrique entièrement en énergie thermique est mis à profit dans le chauffage électrique. Une chaufferette électrique radiante est composée d'un solénoïde de nichrome. Ce matériau est choisi parce qu'il ne fond qu'à la température de 1500 °C et ne s'oxyde pas. Le fil est porté à une température de l'ordre de 900 °C par effet Joule; un miroir, placé derrière l'élément, renvoie vers l'avant les rayons de chaleur émis vers l'arrière. Dans le cas d'une chaufferette électrique à convection, un éventail souffle l'air à être chauffé sur le filament de nichrome: celui-ci, refroidi ainsi avec l'air ambiant, ne dépasse pas la température de 450 °C. C'est l'air qui a servi à le refroidir qui, réchauffé, est soufflé dans la pièce. Dans ces deux cas, la résistance à chauffer est mise sous une tension de 120 V. Dans le cas d'un radiateur de plinthe, utilisé pour le chauffage électrique permanent d'une maison, l'élément chauffant est mis sous une tension de 240 V.
Ces éléments ne sont jamais mis sous des tensions autres que celles mentionnées. Ils ne peuvent donc dépenser qu'une seule puissance électrique de, par exemple, 1250 W; sans quoi, débranchés, ils ne dépensent rien. Un interrupteur thermique détermine quand ils sont ou non sous tension.
b) thermostat
L'interrupteur thermique, ou thermostat, comprend deux languettes d'alliages conducteurs différents, l'un en bronze B , un alliage de cuivre et d'étain, et l'autre en invar I , un alliage d'acier et de nickel, inventé en 1907. Une lame de bronze change facilement de longueur sous l'action de la température; elle s'allonge si la température monte, et se raccourcit, si elle diminue. Une lame d'invar, par contre, ne change pas appréciablement de longueur avec la température (d'où son nom). Ces deux lames sont rivetées ensemble à chaque bout et à un cadre C dans le cas d'une extrémité. Ces deux lames ont même longueur à une température donnée, disons de 20 °C. Si elles sont portées à une température de 25 °C, disons, celles-ci plient de telle sorte que la lame de bronze B soit sur un arc de cercle de plus grand rayon puisqu'elle s'étire alors que celle d'invar I reste de même longueur. Si elles sont portées à une température de, disons, 15 °C, celles-ci plient de telle sorte que la lame de bronze B soit sur un arc de cercle de plus petit rayon puisqu'elle se raccourcit alors que celle d'invar I reste de même longueur.
Le thermostat comprend ces deux lames, placées comme sur le croquis ci-contre, et une troisième en métal M, chacun avec un contact métallique D et E , contacts qui se font face. La température désirée est réglée à l'aide d'une vis V filetée. Tournée dans le sens des aiguilles d'une montre, la vis s'enfonce et fait plier une lame métallique M vers les deux lames rivetées: les contacts D et E se touchent même quand la lame bimétallique plie vers l'extérieur lors d'une température plus chaude. Tournée dans le sens contraire des aiguilles d'une montre, la vis se retire et fait plier la lame métallique M vers la droite: les contacts D et E ne se touchent plus que quand la lame bimétallique plie vers la droite lors d'une température plus froide.
Le thermostat se trouve à couper le circuit dans lequel se trouve l'élément chauffant quand les contacts D et E ne se touchent pas.
c) élément d’une cuisinière électrique
Ce même genre d'interrupteur se retrouve pour régler l'élément d'une cuisinière électrique. Celui-ci est formé d'un fil conducteur enrobé d'un isolant épais. Le fil conducteur, une fois placé sous la tension de 240 V, par exemple, dégage une puissance de 1250 W. Encore une fois, ou l'élément dépense une puissance électrique de 1250 W, ou il ne dépense rien. Si l'effet désiré est une puissance moyenne de 500 W, il s'ensuit que l'élément devra dépenser une puissance de 1250 W pendant 40% du temps, et rien du tout pendant le reste.
Le rôle de l'isolant épais est double: d'abord, de protéger l'utilisateur d'une tension électrique dangereuse de 240 V; puis, de régulariser le débit de chaleur fourni par le fil électrique. Sa capacité thermique considérable fait qu'il s'échauffe et se refroidit lentement. Il se trouve donc à dégager une puissance assez proche de la puissance moyenne dépensée. Evidemment, il reste qu'il dégage le plus de puissance vers la fin du laps de temps durant lequel le fil est sous tension, et le moins à la fin du laps de temps où le fil électrique n'est pas sous tension.
5.8 Éclairage électrique
a) arc électrique
Le chauffage électrique n'a pas été une raison importante du développement des réseaux électriques; contrairement à l'éclairage. L'arc électrique, avons-nous vu, produit une lumière brillante et intense. L'Opéra de Paris est éclairé avec des lumières à arc en 1844. Les éléments de carbone, qui produisent cette lumière, doivent d'abord être mis en contact, puis retirés; ce qui exige un mouvement. De plus, ils se consument avec le temps, ce qui exige un système qui maintient à même distance leurs extrémités qui se font face.
Plusieurs modèles d'arcs électriques automatiques voient le jour. La première lampe à arc installée au Canada, devant l'hôtel Davis à Winnipeg, date de 1873. Des lampes à arc illuminent le Kaiser Arcade à Berlin en 1875. Pavel Nikolaïevitch Iablotchkov (1847-1894) en met au point un meilleur modèle qu'il nomme la bougie électrique en 1876. Celles-ci sont installées à l'Avenue de l'Opéra à Paris en 1877. L'extérieur du Gaiety Theatre de Londres est, lui-aussi, illuminé par des arcs électriques en 1877, et des bougies électriques sont installées sur le Thames Embankment à Londres en 1878. La même année, une bougie électrique est installée devant le collège Sainte-Marie sur la rue Bleury, à Montréal. En 1880, Craig illumine les quatre étages de son usine de Montréal avec des lampes à arc ainsi que les usines de la Grand Trunk Company à Pointe Saint-Charles.
À partir de 1881, l'utilisation de l'arc électrique comme éclairage intérieur est en perte de vitesse, comme ce produit est déclassé par une nouvelle invention: la lampe à incandescence.
b) problèmes de production de l’ampoule électrique
Sir Joseph Wilson Swan (1828-1914) imagine le principe de la lampe à incandescence sous vide en 1845; l'idée est d'éviter la combustion en éliminant l'oxygène du volume là où se trouve un filament de carbone qui est chauffé à blanc par effet Joule. Il produit, à partir de 1848, des filaments de carbone à la fois minces, solides et flexibles. Il bobine en spirale et fourre, avec de la poudre de charbon de bois, des minces languettes de papier, après les avoir saturées d'un mélange de goudron et de mélasse et les cuit dans un four à poterie. Il les monte ensuite dans des ampoules de verre qu'il évacue avec les pompes de l'époque. Mais les pompes de 1845 vouent l'entreprise à l'échec comme le vide qu'elles obtiennent n'est pas assez poussé.
Hermann Sprengel (1834-1906) invente la trompe à mercure en 1861. Celle-ci permet d'obtenir un vide très supérieur aux pompes de 1845. Sir Joseph Swan est mis au courant de l'existence de la pompe de Sprengel en 1875. Il l'utilise avec les mêmes filaments qu'il avait déjà appris à produire 30 ans plus tôt. Il apprend aussi à obtenir un meilleur sceau afin d'éviter que l'air ne revienne dans ses tubes.Il obtient, lentement, des résultats qui vont en s'améliorant: des filaments qui brûlent moins rapidement, une lumière plus intense. Mais ses filaments se désintègrent aux hautes températures requises pour obtenir une lumière assez brillante: la surface interne de ses ampoules est alors noircie. Or, si son filament brûle, c'est qu'il consomme de l'oxygène. Or celui-ci avait été évacué par sa pompe Sprengel. Le sceau de son ampoule ne peut pas être coupable cette fois-ci parce que l'air extérieur entrerait lentement dans l'ampoule que le filament chauffe ou non. Et le filament ne brûle que si l'ampoule de verre est chaude, et non pas après qu'un certain laps de temps se soit écoulé après la pose du sceau.
Il comprend finalement que sa pompe Sprengel n'a pas évacué une certaine quantité d'air, resté collé contre la surface interne de son ampoule. Cet air a dû être décollé de celle-ci après que le filament l'ait chauffé. C'est cet air qui en cause la combustion. Sir Joseph décide alors de chauffer le filament de son ampoule avant d'arrêter de pomper: l'air collé contre les parois s'en détache alors et est évacué par la pompe. Le 18 décembre 1878 à Newcastle, sir Joseph montre au public sa lampe à incandescence.
Thomas Alva Edison (1847-1931) s'intéresse à la production de la lampe incandescente à partir de 1877, formant alors la Edison Electric Light Company. Ses premiers résultats sont tout aussi décevants que ceux de sir Joseph. Il débute son utilisation de la pompe Sprengel en 1879; il utilise, comme filament, du fil à coudre carbonisé et réussit, le 19 octobre 1879, à faire fonctionner sans arrêt une lampe incandescente pour 45 heures, un record pour l'époque. Peu de temps après, Edison fabrique ses filaments avec du papier carbonisé, puisque les lampes qui les possèdent ont une durée de vie d'une centaine d'heures.
La production, sur une base commerciale, de lampes incandescentes à filament de carbone, débute en 1880. La maison de sir Joseph Swan est éclairée avec des lampes incandescentes en 1880; puis en 1881, celle de sir William Thomson, lord Kelvin. En 1880 également, Edison installe 1000 lampes à Londres, et 4000 à New York. Le théâtre Savoy de Londres est équipé avec 1200 lampes incandescentes en 1881. La même année, la gare du North Shore Railway Company à Hochelaga est éclairée avec des lampes à arc à l'extérieur et des lampes à incandescence à l'intérieur, et la compagnie Canadian Electric Light Co se forme à Montréal.
c) améliorations de l’ampoule électrique
Les lampes incandescentes à filament de carbone atteignent finalement des durées de vie de 800 heures et des températures de 1300 °C. En 1906, William David Coolidge (1873-1975), travaillant dans les laboratoires de la compagnie américaine General Electric, produite de la fusion en 1892 de la compagnie d'électricité d'Edison avec la Thomson-Houston Electric, comprime de la poudre de tungstène dans des moules par martelage et chauffage intenses pour en faire des filaments ductiles. Les filaments produits peuvent alors être étirés et ainsi amincis à des dimensions excessivement fines.
Il utilise pareils filaments pour produire des lampes à incandescence pour la compagnie General Electric en 1908, filaments qui peuvent être portés, eux, à une température de 2500 °C. Cette plus grande température donne une lumière deux fois plus intense pour une même consommation électrique. Le long filament, très mince, est torsadé: soit roulé en spirale dans l'ampoule. En 1913, afin de réduire le problème de désintégration du filament de tungstène par évaporation, Irving Langmuir (1881-1957), un collègue de Coolidge à la General Electric, substitue, au vide de l'ampoule, un gaz inerte sous faible pression.
Le filament à double torsade, qui permet une lumière encore plus intense, est finalement introduit en 1934: le filament est d'abord roulé en spirale sur un support qui est lui-même roulé en spirale sur un second.
Le filament F d'une lampe à incandescence moderne est placé au centre du globe de verre de l'ampoule A sur un support de verre S . Les connexions électriques se font entre le culot C et le pied métallique P isolés l'un de l'autre par un anneau isolant I .
d) résistances et puissances de l’ampoule électrique
Les ampoules électriques, après tous ces perfectionnements, ne transforment, en puissance lumineuse, que 5% de la puissance électrique qu'elles consomment; alors que les tubes fluorescents, que nous n'examinerons pas ici, en transforment 20%.
Une ampoule électrique de 60 W / 120 V est une ampoule qui, sous une tension de 120 V, consomme 60 W de puissance électrique quelque temps après avoir été mise sous tension. Elle ne fournit qu'à peu près 3 W de puissance lumineuse. Elle débite, selon la loi de Joule, notre équation (5.6.4), un courant de 0,5 A. La résistance de son filament, alors à la température de 2500 °C, est de 240 Ω. Or la résistance de ce même filament à température de la pièce est de 24 Ω, une valeur 10 fois plus faible. Il s'ensuit que ce filament débite un courant de 5 A au moment où la lampe, froide, est juste mise sous tension, et dissipe alors momentanément 600 W. C'est pourquoi cette situation est celle dans laquelle le filament a le plus de chance de briser, ce qui est bien le cas.
5.9 Résistances équivalentes
a) résistances en série
Deux résistances R1 et R2 , sont dites placées en série si elles se suivent à la queue-leu-leu, dans une même branche. Ce qui implique qu'il n'y a pas d'embranchement au point b où une borne de l'une est reliée à une borne de l'autre. En quel cas le courant I qui circule dans l'une doit, par la première loi de Kirchhoff, circuler dans l'autre. Le courant, dans une résistance, va toujours du potentiel le plus haut au potentiel le plus bas. Il s'ensuit que le potentiel du point a est supérieur à celui du point b , et celui du point b est supérieur à celui du point c . La différence de potentiel entre les points c et a peut s'écrire
en mettant le courant I en facteur. La résistance équivalente Re qui, placée entre les points a et c , débiterait le même courant I lorsque sous même tension
est donc donnée par
la somme des résistances en série.
b) résistances en parallèle
Deux résistances R1 et R2 , sont dites placées en parallèle si leurs bornes sont reliées directement ensemble de chaque côté, soit aux points a et b . Elles sont donc dans deux branches différentes, et les points a et b sont tous deux des embranchements. En quel cas le courant I qui arrive à l'embranchement a doit, par la première loi de Kirchhoff, se diviser et circuler et dans la résistance R1 comme courant I1 et dans la résistance R2 comme courant I2 . Le courant, dans une résistance, va toujours du potentiel le plus haut au potentiel le plus bas. Il s'ensuit que le potentiel du point a est supérieur à celui du point b . De plus ces deux résistances ont même différence de potentiel V . Le courant I qui arrive à l'embranchement a peut donc s'écrire
à l'aide de la loi d'Ohm. La résistance équivalente Re est celle qui, placée entre les points a et b , débiterait le même courant I lorsque sous même tension
Il s'ensuit que son inverse est donnée par
la somme des inverses des résistances en parallèle.
5.10 Le voltmètre
a) circuit de base
Le voltmètre est un appareil utilisé pour mesurer des tensions. Son symbole comprend, comme pour tout appareil de mesure, un cercle, dans lequel apparaît la lettre V pour voltmètre; associée à ce symbole est la résistance interne RV du voltmètre, indiquée explicitement, comme toujours. Il est composé d'un galvanomètre de type Weston, représenté par un cercle comprenant la lettre G , et une résistance RG indiquée explicitement, dont l'aiguille indique une déviation angulaire proportionnelle au courant IG qui le traverse, et d'une résistance complémentaire RC placée en série avec elle. La résistance du voltmètre est donc la résistance équivalente des résistances en série.
La tension VVm maximale qu'il peut mesurer est
donnée par le produit de sa résistance interne fois le courant IGm correspondant à une déviation maximale d'aiguille sur le galvanomètre. Cette valeur détermine l'échelle. Si la tension maximale est de 10 V, l'échelle est de 0 - 10 V.
b) circuits de base avec échelles multiples
La résistance complémentaire RC peut être variée à l'aide d'un commutateur, ce qui permet de changer d'échelles.
Si un galvanomètre, dont l'aiguille indicatrice dévie complètement pour un courant de 10 mA, est utilisé pour former un voltmètre dont l'échelle est de 0 - 10 V, il s'ensuit de l'équation (5.10.1) que la résistance interne de l'appareil doit être de 10V/10mA, soit 1 kΩ. Si la résistance interne du galvanomètre est de 36 Ω, il s'ensuit de cette même équation que la résistance complémentaire doit être de 1000Ω moins 36Ω, soit 964Ω. Si le même galvanomètre est utilisé pour former un voltmètre dont l'échelle est de 0 - 5 V, la résistance interne du voltmètre doit être de 5V/10mA, soit 500Ω, et la résistance complémentaire, de 464Ω.
c) mode d’utilisation et effet du voltmètre
Le voltmètre mesure la tension à ses bornes. Il doit donc être placé en parallèle aux bornes de ce qu'il doit mesurer, comme la tension à ses bornes est alors celle qu'il doit mesurer. La mesure est indiquée directement sur son cadran par la pointe de l'aiguille de son galvanomètre. Le voltmètre demande un courant IG pour faire dévier l'aiguille de son galvanomètre, et ainsi indiquer la tension à ses bornes. Ce courant doit provenir du réseau électrique dont il fait maintenant partie. Or le réseau électrique dont nous désirons vraiment mesurer la tension à ces bornes ne comprend pas ce voltmètre. Il s'ensuit que le circuit mesuré n'est pas celui désiré. L'introduction du voltmètre modifie donc le réseau. Cet effet est d'autant moins important que le courant demandé par le galvanomètre est faible comparé à celui qui circule dans l'élément avec lequel il est en parallèle. À la limite, cet effet est négligeable.
d) comparaison avec d’autres appareils pour mesurer la tension
Ce problème n'a pas lieu avec le potentiomètre, l'appareil de Poggendorff. En effet, celui-ci ne demande aucun courant au réseau lorsqu'est prise la mesure, comme le courant est alors nul dans la branche du galvanomètre. Cet appareil ne fausse donc en rien le circuit externe. Malheureusement, le potentiomètre est beaucoup moins portatif que le voltmètre avec ses deux piles; il requiert de plus deux ajustements, un pour l'étalonnage et l'autre pour la mesure, et un calcul pour trouver finalement la tension à ses bornes, alors que l'aiguille du voltmètre l'indique directement sur son cadran.
Un autre appareil qui mesure la tension est l'électromètre. Cet appareil, tout comme le potentiomètre, ne demande aucun courant et donc ne modifie pas le réseau électrique à ses bornes. Mais il est souvent de modèle très fragile et difficile d'utilisation.
5.11 L'ampèremètre
a) circuit de base
L'ampèremètre est un appareil utilisé pour mesurer des courants. Son symbole comprend, comme pour tout appareil de mesure, un cercle, dans lequel apparaît la lettre A pour ampèremètre; associée à ce symbole est la résistance interne RA de l'ampèremètre, indiquée explicitement, comme toujours. Il est composé d'un galvanomètre de type Weston, représenté par un cercle comprenant la lettre G , et une résistance RG indiquée explicitement, dont l'aiguille indique une déviation angulaire proportionnelle au courant IG qui le traverse, et d'une résistance de dérivation, dite résistance de shunt, RS placée en parallèle avec elle. La résistance de l'ampèremètre est donc la résistance équivalente des résistances en parallèle.
La tension VVm maximale à ses bornes est
donnée par le produit de sa résistance interne fois le courant IGm correspondant à une déviation maximale d'aiguille sur le galvanomètre. Elle est égale à la tension aux bornes de la résistance de shunt, en parallèle, et aux bornes de la résistance de l'ampèremètre, équivalente. Le courant IAm
se divise donc en un courant IGm et un courant ISm maximal. Cette valeur détermine l'échelle. Si le courant maximal dans l'ampèremètre est de 100 mA, l'échelle est de 0 - 100 mA.
b) rôle du commutateur lors du changement d’échelles
La résistance de shunt RS peut être variée à l'aide d'un commutateur, ce qui permet de changer d'échelles. Le commutateur agit alors sur la branche du galvanomètre en même temps que sur la branche de shunt, de telle sorte que le courant lancé dans l'ampèremètre ne passe jamais entièrement dans le galvanomètre, dont la résistance brûlerait vu le courant trop fort.
c) circuit de base avec échelles multiples
Si un galvanomètre, dont l'aiguille indicatrice dévie complètement pour un courant de 10 mA et dont la résistance interne est de 36 Ω, est utilisé pour former un ampèremètre dont l'échelle est de 0 - 100 mA, il s'ensuit de l'équation (5.11.1) que la tension à ses bornes est de 36Ω fois 10mA, soit de 360mV. Puisque le courant alors lancé dans l'ampèremètre est de 100mA, il s'ensuit de cette même équation que sa résistance interne doit être de 360mV divisée par 100mA, soit de 3,6Ω. Puisque le courant total est de 100mA alors que celui de la branche du galvanomètre est de 10mA, il s'ensuit de l'équation (5.11.2) que le courant dans la branche de shunt est de 90mA. Il s'ensuit alors de l'équation (5.11.1) que la valeur de la résistance de shunt est de 4Ω puisque la tension à ses bornes est de 360mV. Si le même galvanomètre est utilisé pour former un ampèremètre dont l'échelle est de 0 - 250 mA, la résistance interne de l'ampèremètre doit être de 360mV/250mA, soit 1,44Ω, le courant dans la branche de shunt, de 250mA moins 10mA, soit 240mA, et la résistance de shunt, de 360mV/240mA, soit 1,5Ω.
d) mode d’utilisation et effet de l’ampèremètre
L'ampèremètre mesure le courant qui le traverse. Il doit donc être placé en série juste avant ou juste après l'élément dont il doit mesurer le courant, sans qu'il se trouve entre eux d'embranchement, comme le courant qui le traverse est alors celui de l'élément en question. La mesure est indiquée directement sur son cadran par la pointe de l'aiguille de son galvanomètre. L'ampèremètre demande une tension à ses bornes pour faire dévier l'aiguille de son galvanomètre, et ainsi indiquer le courant qui le traverse. Cette tension doit provenir du réseau électrique dont il fait maintenant partie. Or le réseau électrique dont nous désirons vraiment mesurer le courant ne comprend pas cet ampèremètre. Il s'ensuit que le circuit mesuré n'est pas celui désiré. L'introduction de l'ampèremètre modifie donc le réseau. Cet effet est d'autant moins important que la tension demandée par le galvanomètre est faible comparée à celle qui trouvée dans l'élément avec lequel il est en série. À la limite, cet effet est négligeable.
5.12 L'ohmmètre
a) circuit de base simplifié
L'ohmmètre est un appareil utilisé pour mesurer des résistances. Son symbole comprend, comme pour tout appareil de mesure, un cercle, dans lequel apparaît la lettre Ω pour ohmmètre; associée à ce symbole est la résistance interne RΩ de l'ohmmètre, indiquée explicitement, comme toujours, ainsi que d'une source de tension ℰ , indiquée explicitement elle-aussi.
La résistance à mesurer R est placée seule à ses bornes. Il s'ensuit que le circuit électrique ne comprend alors que cette résistance R et la résistance interne de l'ohmmètre RΩ . Le courant IA qui circule dans ce circuit série
est donc donné par la force électromotrice de la pile interne divisée par la somme des résistances. C'est ce courant qui va faire dévier l'aiguille de l'ohmmètre.
b) échelle de l’ohmmètre
Ce courant est maximal IAm
lorsque la résistance R placée aux bornes de l'ohmmètre est nulle. L'aiguille de l'ohmmètre dévie donc au maximum quand la résistance à mesurer est nulle. Ce courant dépend donc de deux éléments: la force électromotrice de la pile interne ℰ de l'ohmmètre, et sa résistance interne RΩ . L'équation (5.12.1) montre bien que le courant est au contraire nul quand la résistance R est infinie.
Le croquis précédent montre l'échelle d'un ohmmètre dont la résistance interne est de 100 Ω. A l'extrémité gauche, quand la déviation de son aiguille est nulle, la résistance externe, celle qu'il mesure, est infinie; à l'extrémité droite, quand la déviation de son aiguille est maximale, la résistance externe, celle qu'il mesure, est nulle. Ces deux valeurs sont les mêmes quelques soient les caractéristiques internes de l'ohmmètre: elles ne peuvent donc pas nous servir à caractériser son échelle.
Aussi, dans le cas de l'ohmmètre, la valeur d'une échelle est donnée par la valeur de la résistance indiquée par l'aiguille sur son cadran lorsque celle-ci dévie de la moitié de sa déviation maximale.
Si la résistance R aux bornes est égale à la résistance interne RΩ , l'équation (5.12.1) devient
à l'aide de l'équation (5.12.2). L'aiguille de l'ohmmètre dévie alors de la moitié de sa déviation maximale. La valeur de résistance que l'ohmmètre indique alors, à mi-échelle, est donc sa résistance interne RΩ .
c) circuit de base intermédiaire
Pour changer d'échelle donc, l'ohmmètre doit changer de résistance interne; ce qui veut dire que le courant maximum qui circule dans son circuit série doit changer. Or l'aiguille de l'ohmmètre dévie parce qu'il est composé d'un galvanomètre de type Weston, représenté par un cercle comprenant la lettre G , et une résistance RG indiquée explicitement, dont l'aiguille indique une déviation angulaire proportionnelle au courant IG qui le traverse.
d) circuit de base complet
Mais comme le courant maximum qui circule dans notre circuit IAm est différent du courant maximum IGm qui circule dans le galvanomètre, ce dernier doit faire partie d'un ampèremètre, comprenant donc en plus une résistance de shunt RS placée en parallèle avec lui. La résistance de l'ampèremètre est donc la résistance équivalente des résistances en parallèle. La pile interne comprend, elle-aussi, une résistance interne Ri de telle sorte que le circuit interne de l'ohmmètre peut s'expliciter davantage comme sur le croquis ci-contre, avec la résistance principale Rp . La résistance interne de l'ohmmètre
y est donc donnée par la somme des résistances puisqu'elles sont toutes en série. La résistance Rp est dite principale parce que sa valeur constitue normalement la majeure partie de la valeur de la résistance interne totale RΩ de l'ohmmètre, les résistances Ri et RA étant d'ordinaire faibles en comparaison.
e) circuit de base complet avec échelles multiples
Ce circuit peut être explicité davantage si les résistances internes de l'ampèremètre interne sont explicitées comme sur le croquis ci-haut. Un ohmmètre doit donc, pour avoir plusieurs échelles, posséder une résistance interne qui change selon l'échelle d'une part, et, vu l'équation (5.12.2), un ampèremètre variable dont le courant maximum varie selon l'équation juste mentionnée. Ce qui ne peut se produire que si sa résistance de shunt, par exemple, varie selon l'échelle.
Si une pile de force électromotrice de 1,5V est utilisée dans un ohmmètre dont l'échelle requise est de 100Ω, le courant maximum qui circule dans son ampèremètre, donné par l'équation (5.12.2), est de 1,5V/100Ω, soit de 15mA. Si le galvanomètre, dont l'aiguille indicatrice dévie complètement pour un courant de 10 mA, et de résistance interne 36 Ω, est utilisé pour former cet ampèremètre dont l'échelle doit être de 0 - 15 mA, il s'ensuit par l'équation (5.11.1) que la tension à ses bornes est de 36Ω fois 10mA, soit de 360mV. Puisque le courant alors lancé dans l'ampèremètre est de 15mA, il s'ensuit de cette même équation que sa résistance interne doit être de 360mV divisée par 15mA, soit de 24Ω. Puisque le courant total est de 15mA alors que celui de la branche du galvanomètre est de 10mA, il s'ensuit de l'équation (5.11.2) que le courant dans la branche de shunt est de 5mA. Puisque la tension à ses bornes est de 360mV, il s'ensuit de l'équation (5.11.1) que la valeur de la résistance de shunt est de 72Ω.
Si la pile comprend elle-même une résistance interne de 6Ω, il s'ensuit de l'équation (5.12.4) que la résistance principale doit être de 70Ω, comme la somme de 6Ω, 24Ω et 70Ω fait la résistance interne de 100Ω.
Si la même pile est utilisée cette fois pour faire un ohmmètre dont l'échelle est de 50Ω, le courant maximum qui circule dans son ampèremètre est maintenant de 1,5V/50Ω, soit de 30mA. Si le même galvanomètre est utilisé pour former cet ampèremètre dont l'échelle est de 0 - 30 mA, la résistance interne de l'ampèremètre doit être de 360mV/30mA, soit 12Ω, le courant dans la branche de shunt, de 30mA moins 10mA, soit 20mA, et la résistance de shunt, de 360mV/20mA, soit 18Ω. Il s'ensuit que la résistance principale est de 32Ω comme la somme de 6Ω, 12Ω et 32Ω fait la résistance interne de 50Ω.
Si la force électromotrice de la pile tombe à 1,4V avec usure, il s'ensuit par l'équation (5.12.2) que, sur cette même échelle, le courant maximum qui circule dans l'ampèremètre n'est plus que de 1,4V/50Ω, soit de 28mA. L'aiguille n'indique plus une résistance nulle, comme cela requiert une déviation maximale, quoique la résistance aux bornes de l'ohmmètre l'est effectivement. Ceci est corrigé à l'aide d'un ajustement du zéro effectué grâce à une résistance variable qui, en fait, règle l'ampèremètre pour qu'il tienne compte de la force électromotrice réelle de la pile. Si, dans notre cas, la résistance ajustable est dans la branche de shunt, il s'ensuit de l'équation (5.11.2) que, pour que l'aiguille du galvanomètre dévie complètement, il faut que le courant dérivé ne soit que de 28mA moins 10mA, soit de 18mA. Puisque la tension aux bornes de la branche de shunt doit être encore de 360mV, il s'ensuit de l'équation (5.11.1) que sa résistance doit être de 360mV/18mA, soit de 20Ω, au lieu de 18Ω, comme précédemment.
f) comparaison avec le pont de Wheatstone
L'ohmmètre indique donc, à l'aide de son aiguille, la valeur de la résistance qui est placée, seule, à ses bornes. Il joue donc le même rôle que le pont de Wheatstone. Or ce dernier est beaucoup plus compliqué à opérer: il faut y brancher non seulement la résistance à mesurer mais une autre, de référence. Il faut ajuster le curseur de telle sorte que son galvanomètre indique zéro. Et finalement, faire un calcul en tenant compte des longueurs de fil du rhéostat de chaque côté de son curseur. Il est vrai qu'il faut tout de même ajuster son zéro, comme nous venons juste de voir, mais cette dernière opération est très simple à réaliser. Alors pourquoi s'encombrer d'un pont de Wheatstone? D'abord ce dernier appareil fut inventé bien avant l'ohmmètre. Mais surtout, il est beaucoup plus précis. L'ohmmètre a une échelle qui, n'étant pas linéaire, est difficile à lire, surtout dans la région correspondant à des déviations angulaires plutôt faibles comparées à la déviation totale, alors que le pont de Wheatstone permet des lectures dont l'incertitude est inférieure à 1% sans difficulté.
5.13 Le multimètre
Le galvanomètre Weston a été utilisé, dans nos trois dernières sections, pour produire successivement un voltmètre, un ampèremètre et un ohmmètre de différentes échelles. Ces trois configurations peuvent être placées dans un même boîtier pour créer un multimètre. Celui dont le croquis est ci-contre incorpore les 6 échelles déjà vues préalablement: il agit comme voltmètre d'échelle 0 à 10 V quand son commutateur est en position 1 , et d'échelle 0 - 5 V quand son commutateur est en position 2 ; comme ampèremètre d'échelle 0 à 100 mA quand son commutateur est en position 3 , et d'échelle 0 à 250 mA quand son commutateur est en position 4 ; comme ohmmètre avec la valeur de 100 Ω à mi-échelle quand son commutateur est en position 5 et avec la valeur de 50 Ω à mi-échelle quand son commutateur est en position 6 . La résistance comprenant une flèche à angle est une résistance variable, dont la valeur est ajustée pour tenir compte de la force électromotrice de 1,5V de la pile. C'est elle qui change pour ajuster le zéro quand la force électromotrice de la pile faiblit.
5.14 Circuits électriques
a) résolution de circuits complexes
Les circuits électriques sont, en général, composés de résistances, de forces électromotrices, chacune dotée d'une résistance interne, et de forces contre-électromotrices, chacune dotée de résistance interne. Alors que, dans une force électromotrice le courant va de la borne négative à la borne positive, celui-ci va de la borne positive à la borne négative dans une force contre-électromotrice. Nous verrons plus tard des exemples de chacune.
Les lois de Kirchhoff permettent de résoudre n'importe quel réseau électrique composé de ces éléments, y compris les circuits que nous avons vus jusqu'ici. Mais ceux-ci pouvaient se traiter sans elles, à l'aide des seules lois des résistances équivalentes. Mais il existe des circuits, comme ceux dont un exemple suit, qui ne peuvent se traiter ainsi. Comme la solution, dont la méthode est générale, diffère légèrement pour chaque circuit, nous allons nous contenter d'un cas particulier.
b) exemple
Le circuit qui suit ne comprend que deux embranchements: aux points b et e . Il comprend trois branches: une qui va directement de b à e ; une autre qui s'y rend en passant par a et f ; et la dernière, en passant par c et d .
La première loi de Kirchhoff stipule qu'il n'y a qu'un seul courant par branche. Le choix initial de leur sens n'a pas d'importance. Supposons celui, choisi au hasard, donné sur le croquis, et indiqué aux environs de chaque résistance du réseau. Les polarités aux bornes de chaque résistance du réseau sont maintenant fixées, puisque le courant va toujours, dans une résistance, de sa borne positive à sa borne négative.
La première loi de Kirchhoff appliquée au point b stipule que
la somme des courants qui quittent l'embranchement égale la somme des courants qui y arrivent.
La seconde loi de Kirchhoff stipule que la somme des différences de potentiel le long d'un circuit est nulle. Un circuit possible de ce réseau part de b en traversant d'abord la branche supérieure pour y revenir par la branche du milieu. La somme des différences de potentiel s'écrit alors
après avoir simplifié chaque terme par Ω, puisqu'un gain de potentiel est positif et une perte, négative. Un autre circuit possible de ce réseau part de b en traversant d'abord la branche centrale pour y revenir par la branche du bas. La somme des différences de potentiel s'écrit alors
après avoir simplifié chaque terme par Ω.
Nous voici avec trois équations à trois inconnues. L'équation (5.14.2) se simplifie en
et l'équation (5.14.3)
une fois les termes semblables mis ensemble.
La tentation à éviter est d'additionner terme à terme nos deux dernières équations pour en éliminer le courant I3. Il faut, au contraire, toujours débuter en utilisant l'équation des courants à l'embranchement. Notre équation (5.14.1) peut être utilisée dans l'équation (5.14.5) pour donner
une fois les termes semblables mis ensemble. Isoler le courant I3 de l'équation (5.14.4) permet de le remplacer dans l'équation (5.14.6) pour obtenir
qui devient
une fois les termes semblables mis ensemble. Il s'ensuit que le courant I1 est
de +2A. L'équation (5.14.6) devient à l'aide de l'équation (5.14.9)
qui donne
et permet de trouver, avec l'équation (5.14.1)
le courant manquant.
Les courants positifs sont ceux qui sont réellement dans le sens présumé. Les courants négatifs, ceux qui vont vraiment dans le sens opposé. Le sens réel des courants est indiqué sur le croquis qui suit.
Le courant va de la borne négative à la borne positive dans le cas de l'élément de 60V. C'est donc une force électromotrice. La tension à ses bornes dans le sens du courant est de (+60V - 2Ω⋅2A), soit de 56V. La puissance brute que celle-ci fournit au circuit est donnée par 60V fois 2A, soit 120W; mais sa résistance interne consomme une puissance de 2Ω fois 2A au carré, soit de 8W; sa puissance nette fournie au circuit est de 112W (120W moins 8W, ou 56V fois 2A). Le courant va de la borne positive à la borne négative dans l'élément de 15V: c'est donc une force contre-électromotrice. La tension à ses bornes dans le sens du courant est de - 1Ω⋅5A - 15V, soit - 20V. La puissance soutirée par la force contre-électromotrice elle-même est de - 15V fois 5A, soit - 75W; la puissance requise par sa résistance interne est de - 1Ω fois 5A au carré, soit - 25W. La puissance totale soutirée au circuit est de - 100W (-75W-25W, ou -20V⋅5A). Le courant va de la borne négative à la borne positive dans le cas de l'élément de 56V. C'est donc une force électromotrice. La tension à ses bornes dans le sens du courant est de (+56V - 3Ω⋅3A), soit de 47V. La puissance brute que celle-ci fournit au circuit est donnée par 56V fois 3A, soit 168W; mais sa résistance interne consomme une puissance de 3Ω fois 3A au carré, soit de 27W; sa puissance nette fournie au circuit est de 141W (168W moins 27W, ou 47V fois 3A).
5.1 Si la puissance maximale que peut dissiper sans danger une résistance de 10 kΩ est de 2 W, quelle tension maximale peut-elle supporter à ses bornes?
5.2 Quelle puissance peut dissiper sans danger une résistance de 20 kΩ pour qu'elle puisse supporter 300 V à ses bornes?
5.3 Les spécifications d'une lampe incandescente sont 100 V / 500 W; elles s'appliquent quand son filament est chaud. Si sa résistance est dix fois plus petite quand son filament est froid, quelle puissance consomme-t-elle alors?
5.4 Les spécifications d'une chaufferette électrique sont 100 V / 2 kW.
a) Quel courant circule normalement dans l'élément chauffant?
b) Quelle en est alors la résistance?
5.5 La chaufferette du problème précédent est munie d'un relais thermique. Celui-ci est ajusté pour que la chaufferette produise en moyenne une puissance thermique de 1,5 kW. Pendant quelle proportion du cycle l'élément chauffant consomme-t-il du courant?
5.6 Une résistance est placée en série avec la chaufferette du problème précédent et une source de tension de 100 V pour que la chaufferette consomme constamment 1,5 kW.
a) Quelle puissance électrique la source de tension fournit-elle alors?
b) Quelle est alors la puissance thermique dégagée dans la pièce?
5.7 Un élément d'une cuisinière électrique consomme une puissance de 2 kW lorsque branché à une source de tension de 220 V.
a) Quelle est sa résistance?
b) Que faire pour qu'il dégage une puissance thermique moyenne de 1,2 kW?
c) Quelle puissance thermique peut-il dégager s'il est branché à une source de 110 V?
5.8 Un rhéostat de 15 Ω de résistance est placé aux bornes d'une source de tension de 100 V sans résistance interne. Une lampe incandescente de 100 V / 1000 W est connectée au rhéostat de telle sorte que son curseur est aux deux tiers, tel qu'illustré sur le croquis ci-contre.
a) Quelle puissance électrique la lampe incandescente consomme-t-elle?
b) Quelle puissance électrique est alors requise de la source?
5.9 La borne C du rhéostat du problème précédent est maintenant débranchée. Le circuit devient alors celui de la figure ci-contre.
a) A quelle position faut-il ajuster le curseur du rhéostat pour que la lampe incandescente consomme la même puissance électrique qu'au problème précédent?
b) Quelle puissance électrique est alors requise de la source?
c) Ce système est-il plus efficace que le précédent?
5.10 Un circuit comprend trois éléments en série, à savoir une source sans résistance interne, une résistance de 1000 Ω et une de 200 Ω. Un voltmètre, placé aux bornes de la source, mesure une tension de 14 V; placé aux bornes de la résistance de 1000 Ω, il mesure 10 V.
a) Que mesure-t-il une fois placé aux bornes de la résistance de 200 Ω?
b) Quel y serait le potentiel si le voltmètre n'était pas là?
5.11 Un voltmètre est placé en parallèle aux bornes de la résistance de 4 kΩ du circuit ci-contre. Sa résistance interne est de 1 kΩ sur l'échelle de 0 - 1 V. Il mesure alors une tension de 1 V.
a) Quel courant requiert son galvanomètre pour que son aiguille dévie complètement?
b) Quelle est la valeur de la résistance R du circuit?
c) Que mesure le voltmètre s'il est placé sur l'échelle de 0 - 5 V?
d) Quelle tension mesurerait un potentiomètre à sa place?
5.12a) Quelles sont les résistances R1 à R3 composant le voltmètre ci-contre dont le galvanomètre, de 100 Ω de résistance interne, demande un courant de 5 mA pour que son aiguille dévie complètement.
b) Que mesure ce voltmètre s'il est placé aux bornes de la résistance de 2 kΩ sur l'échelle de 0 - 10 V?
c) Quelle tension mesurerait un potentiomètre à sa place?
5.13 a) Quelles sont les résistances R1 à R3 composant l'ampèremètre ci-contre dont le galvanomètre, de 100 Ω de résistance interne, demande un courant de 5 mA pour que son aiguille dévie complètement. Que mesure cet ampèremètre s'il est placé dans le circuit ci-contre sur l'échelle de
b) 0 - 250 mA?
c) 0 - 1 A?
d) 0 - 5 A?
5.14 Quelles sont les valeurs des résistances R1 à R8 requises pour produire le multimètre dont le croquis est ci-contre si ses échelles sont, dans l'ordre, de 1 à 4 : 0 -10 V; 0 - 1 V; 0 - 1 A; 0 -100 mA. La valeur lue à mi-échelle sur les échelles 5 et 6 est respectivement de 30 Ω et 300 Ω. L'aiguille du galvanomètre, dont la résistance interne est de 100 Ω, dévie complètement pour un courant de 200 μA. (Il est recommandé de procéder au calcul des résistances dans l'ordre de leurs indices.)
5.15
L'aiguille du galvanomètre du multimètre dont le circuit est indiqué ci-contre dévie complètement pour un courant de 200 μA. Sa résistance interne est indiquée, comme toutes les autres résistances. Quelles sont les 6 échelles de ce multimètre? Dans le cas des échelles d'ohmmètre, il faut trouver la valeur indiquée sur le cadran à mi-échelle.
5.16 Le cadran d'un ohmmètre indique la valeur de 1 kΩ à mi-échelle. De quelle déviation (en proportion de sa déviation maximale) son aiguille dévie-t-elle lorsqu'une résistance de 500 Ω est à ses bornes?
5.17 L'aiguille d'un ohmmètre dévie au quart de son échelle lorsqu'une résistance de 1 kΩ se trouve à ses bornes. La force électromotrice de sa pile est de 1,5 V.
a) Quelle est sa résistance interne?
b) Quel est le courant, coulant dans la résistance mesurée, qui entraîne une déviation complète de son galvanomètre?
5.18 L'échelle d'un ohmmètre indique la valeur de 1 kΩ à mi-échelle. Un voltmètre, placé à ses bornes sur l'échelle de 0 - 5 V, indique alors une tension de 2,5 V. L'aiguille de l'ohmmètre indique alors une résistance de 5 kΩ.
a) Quelle tension mesurerait le voltmètre si une résistance de 1,25 kΩ était placée en parallèle avec lui aux bornes de l'ohmmètre?
b) Quelle résistance indiquerait alors l'aiguille de l'ohmmètre?
c) Quel courant maximum le galvanomètre du voltmètre peut-il mesurer?
5.19 Un potentiomètre, placé aux bornes d'un ohmmètre, mesure une tension de 1,2 V. S'il y est remplacé par un voltmètre de 1 kΩ de résistance interne, celui-ci mesure 0,8 V alors que l'aiguille de l'ohmmètre dévie au tiers de sa déviation complète. De combien dévierait l'aiguille de l'ohmmètre si le voltmètre était alors remplacé par une résistance de 500 Ω?
5.20 L'angle correspondant à la déviation complète de l'aiguille d'un ohmmètre est de 120°. Une résistance de 500 Ω est placée, en série avec un ampèremètre de résistance négligeable, aux bornes de l'ohmmètre. L'ampèremètre mesure alors un courant de 4,5 mA et la déviation angulaire de l'aiguille de l'ohmmètre est de 90°. L'ampèremètre mesure un courant de 3,6 mA si la résistance de 500 Ω est remplacée par une autre.
a) Quelle est alors la déviation angulaire de l'aiguille de l'ohmmètre?
b) Quelle est la valeur de cette résistance?
c) Quelle tension mesurerait un potentiomètre placé seul aux bornes de l'ohmmètre?
d) Quelle serait alors la déviation angulaire de l'aiguille de l'ohmmètre?
5.21 Le circuit ci-contre comprend un ohmmètre et un voltmètre placés aux bornes d'éléments d'un circuit initial. Leurs résistances internes (et la force électromotrice de l'ohmmètre) sont indiquées.
a) Quelle tension mesure le voltmètre?
b) Quelle résistance mesure l'ohmmètre?
(Il devrait être apparent que la réponse de la deuxième question n'est pas 500 Ω puisqu'un ohmmètre ne doit pas être branché ainsi pour prendre une mesure correcte.)
5.22 Le circuit ci-contre comprend deux forces (contre-)électromotrices chacune de résistance interne indiquée. Deux voltmètres, chacun de résistance interne de 10 kΩ indiquée, mesurent la tension à leurs bornes. Le voltmètre V1 indique une tension de 30 V avec les polarités données sur le croquis. Un ampèremètre, de résistance interne négligeable, mesure un courant de 8 mA, avec les polarités indiquées sur le croquis.
Quelle est la
a) tension mesurée par le voltmètre V2 ?
b) force (contre-)électromotrice ℰ1 ?
c) force (contre-)électromotrice ℰ2 ?
5.23 Quelles sont, dans le circuit ci-contre les valeurs des forces (contre-)électromotrices
a) ℰ1?
b) ℰ2?
5.24 Quelles sont les puissances produites ou consommées par chaque élément du circuit ci-contre, à savoir les piles de 9 V et de 1 V, ainsi que les résistances de 3 Ω, 5 Ω et 1 Ω?
5.25 Quelle est la puissance nette (produite ou consommée) par les éléments suivants trouvés dans le circuit ci-contre:
a) la résistance de 20 Ω?
b) la force (contre-)électromotrice ℰ4 de résistance interne 3 Ω illustrée?
c) la force (contre-)électromotrice ℰ3 sans résistance interne?
5.26 Quel sont les courants qui coulent respectivement dans les résistances de 21 Ω, 20 Ω et 4 Ω du circuit ci-contre?
5.27 Quelle est la tension
a) aux bornes de la résistance de 2 Ω?
b) aux bornes de la résistance de 10 Ω?
c) aux bornes de la résistance de 1 Ω?
d) entre les points A et B du circuit ci-contre?
5.28 Quelles sont les puissances nettes, fournies ou consommées, par les éléments suivants du circuit ci-contre:
a) la force (contre-)électromotrice de 70 V de 2 Ω de résistance interne illustrée?
b) la force (contre-)électromotrice de 100 V de 1 Ω de résistance interne illustrée?
c) la force (contre-)électromotrice de 30 V de 6 Ω de résistance interne illustrée?
5.29 Quelles sont les puissances nettes, fournies ou consommées, par les éléments suivants du circuit ci-contre:
a) la force (contre-)électromotrice de 135 V de 0,5 Ω de résistance interne illustrée?
b) la force (contre-)électromotrice de 40 V de 5 Ω de résistance interne illustrée?
c) la force (contre-)électromotrice de 100 V de 20 Ω de résistance interne illustrée?