7.13 Le câble transatlantique

 

En 1856, l'idée d'un câble télégraphique transatlantique devient très attrayante. Le réseau de la compagnie américaine Western Union est alors très vaste; et l'Europe comprend plusieurs réseaux de télégraphes aériens. Terre-Neuve est relié au Cap Breton, Nouvelle-Ecosse, par un câble sous-marin de 120 km de longueur, posé dans le détroit de Cabot, dont la profondeur moyenne est de 400 m et maximale est de 500 m, par Frederic Newton Gisborne en 1856 après qu'il ait relié ce dernier point au réseau américain. Et l'Irlande est reliée au réseau britannique depuis 1853; et ce dernier, au reste de l'Europe depuis 1851. Il reste donc à concevoir un câble sous-marin pour relier Trinity Bay, au nord de St John's, à Terre-Neuve, à Valentia Bay, à la pointe de la côte sud-ouest de l'Irlande, points situés à 3000 km l'un de l'autre. La profondeur de l'Atlantique entre ces deux points varie entre 3300 m et 4700 m, ce qui est environ dix fois plus que les cas précédents.

 

c2.gif

Le premier câble transatlantique est construit est 1857. Sa conception est en partie le travail de lord Kelvin. Sa section de cuivre, de 2,27 mm2 , est composé de sept fils de cuivre C de 0,324 mm2 de section chacun, tordus ensemble. L'ensemble est recouvert par trois couches de gutta-percha P. Sa masse de cuivre est de 26 kg et celle de gutta-percha, de 64 kg par km. Le gutta-percha est recouvert de chanvre G saturé d'un mélange de poix, cire, huile de lin et goudron. Ce chanvre saturé est recouvert d'une gaine F composée de 18 faisceaux de sept fils de fer de 0,324 mm2 de section chacun tordus ensemble, elle-même recouverte d'un mélange de goudron, poix et huile de lin. Ce câble toronné a alors une masse de 560 kg par km.

 

Ce câble est prévu de telle sorte que sa constante de temps ne soit pas trop grande sinon le signal n'arrive à l'autre bout que si lentement que la quantité d'information qu'il peut porter est trop faible. Lord Kelvin mesure la constante de temps d'un prototype immergé, et sachant que celle-ci va comme le carré de la longueur, établit que celle du câble prévu doit être assez courte. Ce câble comporte une gaine beaucoup plus importante que les autres câbles puisqu'il doit supporter, lors de la pose, une longueur égale à une profondeur de 4700 m. Ce qui demande également qu'il soit aussi léger que possible.

 

Le premier essai de pose de ce câble se solde par un échec en 1857. Le second réussit en 1858. Le premier message est transmis le 17 août 1858: il est à peu près deux fois plus lent que prévu; de plus, son opération se détériore et il cesse de fonctionner après trois semaines.

 

c3.gif

Le second câble transatlantique est conçu en 1865, après une commission d'enquête, à laquelle participe lord Kelvin, sir Charles Wheatstone, et plusieurs autres. Le conducteur est un toron de sept fils de cuivre C de 0,82 mm2 de section chacun, pour une section de cuivre de 5,75 mm2 , soit 2,5 fois celle du premier. Sa masse de cuivre est donc de 74 kg par km. De plus, la résistivité du cuivre utilisé est beaucoup plus proche de celle du cuivre pur que celle du premier câble, de telle sorte que la résistivité du second est environ 20% plus faible que celle du premier. Il s'ensuit que sa résistance est environ trois fois plus faible. De plus, celle-ci est vérifiée au fur et à mesure de sa construction, contrairement au cas de premier câble.

 

Afin de mieux éviter que l'isolant ne fasse défaut, comme la première fois, le gutta-percha P est appliqué sous la forme de quatre rubans isolants adhésifs superposés. La masse du gutta-percha ainsi appliqué est de 98 kg par km, soit 50% de plus que dans le premier cas. Le gutta-percha est recouvert d'une gaine de jute goudronnée G sur laquelle est tressée une gaine toronnée de dix fils de fer F de 2,6 mm2 de section, chacun recouvert de chanvre. Le diamètre total du câble est de 28 mm. Sa masse, de 1,05 kg/m. La gaine est de loin mieux coussinée que dans le cas précédent, diminuant d'autant le risque d'endommager le gutta-percha.

 

Le premier essai de pose de ce nouveau câble se solde par un échec en 1865. Le câble est repêché l'année suivante, réparé, et sa pose, complétée, ainsi que celle d'un second. Les deux entrent en opération, cette fois de façon satisfaisante, en juillet 1866: l'Amérique du nord et l'Europe font, depuis ce temps, partie d'un vaste réseau de télécommunications pratiquement instantané.