À la session inaugurale
de l'Association
Henri Capitant, tenue à Québec
Résumés des discours de Maurice Duplessis
et de Jean Niboyet suivis de celui d'Émery Beaulieu.
L'HONORABLE M. DUPLESSlS*
premier ministre de la province de Québec.
Le premier ministre a souhaité la bienvenue aux
délégués venus de France, de Belgique, de Suisse,
de Roumanie, d'Égypte et d'Haiti afin de mettre
en commun avec
les juristes français du Québec leurs connaissances
et de rendre hommage à trois siècles de fidélité
à l'esprit français, fidélité que la loyauté
au Canada et à l'Angleterre n'a pas amoindrie.
M. JEAN NIBOYET*
professeur à la faculté de Droit de Paris,
secrétaire-général de
l'Association Henri Capitant et président de
la délégation étrangère.
M. le professeur Niboyet a d'abord rappelé le souvenir
d'Henri Capitant qui choisit, avant sa mort, Québec
comme le lieu du congrès. II a ensuite montré
que souvent
la vieille doctrine juridique française s'était
conservée
plus pure dans notre province qu'en France
où elle avait
pourtant sa source. Une étudiante en droit vient
d'obtenir,
à Paris, son doctorat. Après une thèse sur l'étude
comparée de certaines parties du code civil
communes à la France et la province de Québec.
Le droit français, a-t-il dit, n'est pas seulement une
page d'histoire, il est aussi un merveilleux instrument et
une force spirituelle. Le droit français est ancien mais
ses principes trouvent leur application même aux
circonstances de la vie moderne.
M. Niboyet a rappelé cette phrase de Péguy: "Il n'y a
pas de lendemain sans veille." II l'a appliquée
au droit et il
a montré que le droit français était le fruit des siècles
alors que le nouveau droit était celui de l'arbitraire et qu'il
conduisait à la barbarie. Le droit français, dit-il, tient au
respect de l'individu, de la parole donnée, et des droits de
chacun, il oppose la liberté à la violence, l'intelligence à
la force.
Me. L.-É. BEAULIEU, C.R.L.L.D.
président du Comité National Canadien
de l'Association Henri Capitant
pour la Culture Juridique Française.
Le Comité National Canadien est heureux de se joindre
aux chefs de la nation, pour souhaiter à l' Association
Henri Capitant la plus cordiale bienvenue.
À la verite, l'association se trouve chez elle, dans
cette province. C'est, en effet, à Montebello, dans la province
de Québec, et à la suite des Journées du Droit
Civil de 1934, que sa fondation fut arrêtée. Je revois
encore le maître éminent dont l'association porte aujourd'hui
le nom, exposant, avec cette méthode et cette
clarté que l'on retrouve dans tous ses ouvrages, les
objets de l'institution que son esprit avait conçue, écartant
les objections au fur et à me sure qu'elles lui étaient
présentées et finissant par infuser dans l'âme de tous les
auditeurs le zèle et la conviction dont la sienne était
remplie.
L'association tint son premier congrès à Paris. Déjà
atteint par le mal qui devait le terrasser, feu Henri
Capitant fut incapable d'y assister; mais sa pensée inspirait
et dirigeait nos délibérations aussi sûrement que
s'il eut été présent en personne.
Puis, vint l'heure de choisir le lieu de la prochaine
réunion et, comme l'association hésitait entre plusieurs
invitations également pressantes, ce fut le désir exprimé
par feu Henri Capitant qui emporta l'adhésion de
tous.
On peut donc dire que notre association exécute
l'une des dernières volontés de son illustre fondateur en
se réunissant dans cette province et dans cette ville.
D'autres grands juristes, membres de cette association,
sont également disparus. Qu'il me soit permis de
saluer ici, avec respect, la mémoire de cet autre maître
de la science du Droit, René Demogue.
Devant ces deuils, notre émotion est profonde.
Mais le moyen véritable d'honorer ces grands disparus,
c'est d'assurer la survivance de leur oeuvre.
C'est pour assurer cette survivance que se tient ce
congrès.
Quant à nous, juristes de langue française du Canada,
conscients des immenses avantages que peut nous
procurer une communion de plus en plus étroite avec la
pensée juridique française, nous formons le voeu que
l'association Henri Capitant grandisse et se développe,
bien résolus à faire tout ce qui dépend de nous pour
assurer la réalisation de ce voeu.
* Ce que nous reproduisons ici est un extrait du journal
"Le Soleil," en date de 21 août 1939.
|