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Élections et émeutes

Le bon vieux temps

D'après des articles parus dans le journal La Patrie en décembre 1884.


    LE BON VIEUX TEMPS

    Comment se faisaient les élections - l'émeute de 1832.

  1. Les élections en 1832

    Dans le bon vieux temps les élections parlementaires ne se faisaient pas dans une seule journée. Les bureaux de votation restaient ouverts tous les jours tant qu'il s'enregistrait une voix à l'heure. Il arrivait très-souvent que les élections duraient un mois et les rixes étaient aussi fréquentes que sanglantes entre les patriotes et les bureaucrates.

    Le premier mai 1832, les citoyens de Montréal furent appelés à choisir un député pour l'assemblée législative.

    Deux candidats étaient sur les rangs le docteur Tracey, un des collaborateurs du Vindicator, un patriote à tous crins, et M. Stanley Bagg, un riche propriétaire bureaucrate renforcé. Les polls furent ouverts le premier mai et la votation continua sans troubles remarquable jusqu'à 21.

  2. L'émeute du 21 mai 1832

    Le 21 les voix étaient à peu près également divisées et le sentiment populaire avait été chauffé à blanc.

    Les coups de poings et les coups de bâtons s'échangèrent entre les torys et les libéraux à tous les polls. Le foyer le plus ardent de la lutte était le poll de la rue St-Jacques.

    Des forts à bras étaient soudoyés par les torys qui assommaient les patriotes assez braves pour se présenter au bureau de votation. Les patriotes résolus d'affirmer leurs droits recrutèrent des forces et prirent une revanche éclatante. Ils s'élancèrent sur les torys qui battirent une prompte retraite sous une grèle de coups de poings et de coups de manches de hache. Joe Monferrand était au premier rang.

    Les torys s'étaient réfugiés sur la Place d'Armes et à l'entrée de l'ancienne petite rue St. Jacques lorsque le Docteur Robertson fit demander les militaires. Entre midi et une heure une couple de compagnies de soldats parut sur la place d'Armes.

    L'Acte des émeutes (Riot Act) fut lu par un juge de paix M. Janvier Danteil Lacroix.

    Ordre fut donné au militaire de charger à la baïonnette. La foule recula dans la rue Saint Jacques. Lorsqu'elle fut rendue près de la rue Saint-Pierre, elle s'arrêta. Alors les soldats ouvrirent le feu sur les patriotes. Trois hommes qui n'avaient pas pris part à l'émeute tombèrent sous les balles pour ne plus se relever. C'était Byette, Languedoc et Chauvin. Les deux premiers étaient de pauvres journaliers et le troisième était un typographe employé à la Minerve.

  3. Un pugilat électoral mortel en 1832

    C'est pendant la même élection remportée par M. Tracey, que le grand Voyer assomma près d'un poll un bully bureaucrate Bill Collins, le boxeur le plus redoutable du parti tory. Bill ne se tenait près du bureau de votation et massacrait impitoyablement tous les irlandais et les canadiens français qui s'approchaient.

    Le grand Voyer, un patriote dévoué, un des citoyens les plus paisibles et des plus respectables de Montréal, résidait sur sa propriété au coin des rues Saint-Laurent et Mignonne et vivait de ses rentes.

    Il était doué d'une force herculéenne et il avait une taille d'environ six pieds et demi.

    Voyant que ses compatriotes se faisaient maltraiter, il se décida à faire le coup de poing. Il frappa le plus fort de la bande et celui-ci tomba assommé. On transporta Bill Collins dans uen petite auberge de la place du Marché au foin (aujourd'hui la Place Victoria) où il rendit le dernier soupir quelques minutes après.

    La mort de Bill Collins ne fut regrettée de personne. Il avait eu souvent maille à partir avec la justice qui l'avait marqué par la main du bourreau. Le grand Voyer subit son procès devant la cour du Banc de la Reine et fut acquitté, parce qu'il avait été prouvé qu'il avait donné le coup homicide à corps défendant.

  4. La Place d'Armes en 1832

    En 1832, à l'époque de l'émeute dont nous venons de parler la Place d'Armes était loin de présenter la magnifique apparence qu'elle a aujourd'hui. L'ancienne Banque de Montréal était située au coin de la rue St François Xavier, sur le site actuel du bureau de poste. Il y avait un terrain vague entre cet édifice et le coin de la côte de la Place d'Armes.

    Sur ce dernier coin était bâti un hangar appartenant à M. Dubois, père de M. Etienne Dubois, employé [de] la Fabrique.

    La Patrie, mardi 16 décembre 1884, page 4.





Jacques Beaulieu
beajac@videotron
Révisé le 22 juillet 2019
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