LE BON VIEUX TEMPS
Quelques articles du menu des cultivateurs, la tire-liche, la pitoune, les tartes
à la ferlouche, etc. - Le carême.
- Quelques mets disparus avant 1860
La cuisine de nos grands-pères offrait peu de points de différence avec la cuisine
bourgeoise de nos jours. Ses traditions ont été conservées dans presque toute leur
pureté par nos ménagères. Il y a bien quelques articles de menu du bon vieux temps
qui sont disparus depuis une vingtaine d'années, mais les pièces de résistances
sont restées les mêmes.
On ne parle plus aujourd'hui de la soupe de la Vierge qui était composée de lait, de
chou blanc et d'oeufs. Ce potage était servi très souvent dans les villes.
Les premiers colons du lac Aylmer, dans le comté de Lambton, avait un plat spécial
appelé la tire-liche. La tire-liche était un ragoût dont les éléments
étaient des tranches de lard, des oignons, de la citrouille et de la mélasse.
Les anciens cultivateurs mangeaient souvent de la pitoune, une galette faite
avec de la grosse farine de sarrasin et de la mélasse.
Les tartes à la "ferlouche" étaient et sont encore un dessert bien populaire dans les
campagnes.
Dans ces tartes les confitures étaient remplacées par un mélange de mélasse et de farine.
Les jours de fête on servait comme dessert de la "poutine glissante". On appelait ainsi
une pâte épaisse, coupée en carrés et bouillie dans l'eau. Ce mets se mangeait avec de la
mélasse ou du sucre d'érable et ressemblait beaucoup aux crêpes blanches connues sous le
nom de "grands pères."
Les "habitants" pauvres se nourrissaient avec du pain fait avec de la farine de pois,
un aliment souverainement indigeste. Ils cuisaient sur le dessus du poèle avec de la
graisse de lard des galettes de farine d'avoine.
Ils composaient un potage épais avec du blé non cassé bouilli dans l'eau.
On voyait aussi figurer sur le menu le café d'orge.
Les grains d'orge étaient grillés dans un fourneau et on les faisait infuser comme la
graine aromatique de Moka.
Ils prenaient toutes les parties maigres du porc et les faisaient bouillir dans une grande
marmite, en les entremêlant avec des carreaux de pâte. Ce mélange était soumiss à la gelée
et servait aux repas de gala pendant tout l'hiver.
On rôtissait les épis de maïs sur la braise des grandes cheminées entre les chenets.
On laissait prendre au blé-d'inde une couleur brune foncée avant de le retirer du feu.
- Le carême avant 1860
La carême, tel qu'il était observé par les anciens, était beaucoup plus rigoureux
que celui de nos jours. Il n'était pas permis de manger de la viande et des oeufs, depuis
le Mercredi des cendres jusqu'au déjeuner de Pâques. Le catholique ne faisait que deux
repas par jour, excepté le dimanche où ils en faisaient trois.
Comme il n'y avait pas de communication faciles avec Halifax et Portland, les poissons
frais de la mer figuraient rarement sur la table du riche et le pauvre faisait son carême
avec la morue et le harang salés.
Un vieillard nous disait ce matin: "Dans le village où j'ai été élevé j'ai connu plus d'un
cultivateur qui pendant le carême se rendait à sa grange tous les matins à quatre heures
et demie et battaient du grain jusqu'au moment de son déjeuner à onze heures et demie.
Les dispenses se donnaient dans des cas extrêmement rares. L'Eglise permettait aux
hommes de chantier qui travaillaient à abattre des arbres de manger avec leur pain un
peu de graisse au lieu de beurre.
Le carême de nos pères étaient réellement un temps de pénitence et de mortification, car
riche comme pauvre devait renoncer aux douceurs de la table.
A la fin de l'année ils ne s'en portaient pas plus mal... au contraire.
La Patrie, samedi 20 décembre 1884, page 4.