Mes racines / my roots

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Lettre du 26 mai 1902
Lettre du 26 mai 1902



N. B. Les lettres à folios multiples ont été reconstituées en tenant compte de leur position dans la liasse de papiers, de la couleur de l’encre, la dimension du papier et la suite dans le texte; l’ordre n’est pas toujours certain; aussi le début de chaque folio est clairement identifié, ainsi que sa place présumée dans la lettre:


[Premier folio de deux pages 20 x 26 cm]
Montréal, 26 mai 1902
À Mademoiselle Attala Mallette
Sainte Martine
Ma petite Chérie, Il ne faut pas m’en vouloir, si je ne suis pas allé vous voir, samedi passé; il ne faut pas m’en vouloir, si je suis un peu en retard pour vous écrire, la faute en est à ces malheureux examens qui approchent, qui volent vers nous avec une rapidité effrayante. Il faut savoir beaucoup pardonner à celui qui sait beaucoup vous aimer; & vous êtes convaincue, n’est-ce pas? que je vous aime beaucoup.

Ma Bien-Aimée, petite reine, comme je vous aimais durant votre dernier voyage; comme elle était douce cette vie passée en grande partie auprès de vous; quel délicieux avant-goût, de ce que sera toute une existence passée à vous aimer, à être aimé de vous. O! ma chérie, il me semble que je vous connais mieux depuis ce temps; que j’ai pénétré plus intimement dans votre âme, qu’un lien nouveau m’attache à vous; et je vous chéris davantage, & davantage je soupire après l’instant béni de notre union, davantage j’ai soif de votre amour, de vos caresses. Je vous l’avoue, Attala Adorée, c’est la crainte de retarder de 6 mois notre félicité, qui réveille mon courage défaillant & me donne la force de travailler âprement pour assurer le succès de mon examen de la semaine prochaine, ainsi que l’examen du barreau.

Sans cette pensée, j’accepterais plus volontiers l’idée d’échouer dans cette épreuve finale, mais, mon Dieu! je ne puis plus me passer de vous; il me faut votre présence continuelle à mes côtés; il me faut les délicates attentions de votre bon coeur affectueux, noble généreux, il me faut vos deux petits bras autour de mon cou; & vos lèvers ardentes sous mes baisers; il me faut vous-même pour épouse, le plus tôt possible! Comprenez-vous que la pensée de retarder de six mois, tout ce bonheur, toute cette félicité, tout cet enivrement, me donne le courage, de dompter la fatigue & l’accablante chaleur & le dégoût de cette vie sans consolation que je mène de ce temps-ci.

Ma petite Adorable, je ne vous ai pas écrit dimanche, mais je suis en revanche allé communier pour [Deuxième folio de deux pages 20 x 26 cm, dont le bas de la page est déchirée, ce qui affecte le dernier paragraphe de la lettre] vous, & pour votre bonheur, j’ai prié de toute mon âme. Avec toute la ferveur dont je suis capable, j’ai supplié Dieu de vous rendre heureuse dès maintenant, de nous rendre heureux ensemble, dans une affection pure & vraiment chrétienne; j’ai demandé que vous soyez toujours bonne comme maintenant, toujours affectueuse pour votre Émery, toujours fidèle épouse, & compagne dévouée. Je vous ai demandée, vous, pour ma part de bonheur ici-bas, & j’espère être exaucé.

Ma Bien-Aimée, vous savez que j’ai concouru pour le prix des professeurs, dès mon retour à la ville. Le résultat m’a été communiqué hier. Sur cinq concurrents, deux avaient été mis de côté de suite, quant aux trois autres; la différence entre les copies était si mince, qu’ils ont décidé de donner un second prix, à un de mes adversaires, M. Langlais; ce qu’ils n’ont jamais fait auparavant; puis, il restait encore M. Rhéaume & moi à détailler; après mûre délibération, ils ont décidé de nous proclamer ex aequo, partageant ainsi le prix entre nous deux: inutile de vous dire que je suis bien content; plus peut-être, que si j’étais arrivé seul; car d’abord M. Rhéaume est un ami intime, dont l’amitié date des bonnes années de collège & qui a beaucoup travaillé; ensuite, le cas est peut-être unique, dans l’histoire de l’Université: à vaincre sans danger, on travaille sans gloire.

M. Le Doyen, l’honorable Juge Mathieu, m’a adressé à ce sujet une magnifique lettre, sur parchemin, aux armes de la Faculté, & extrêmement flatteuse: je vous la montrerai si vous en manifestez le désir.

Ma Chérie, je compte aller à Ste Martine, samedi prochain, 31 mai, - serez-vous visible, pour votre Émery?

Je dis, «je compte», c’est-à-dire que je me suis tracé un programme d’étude, qui, s’il est rempli, me permettra de prendre dimanche, comme congé; mais si je ne puis le remplir je resterai ici pour le terminer. À vous de m’aider, en priant pour moi, & en m’écrivant jeudi ou vendredi.

J’ai fait votre commission; je vous ai acheté de la broderie, j’aime beaucoup jouer ainsi un petit mari; à la prochaine occasion.

Je vous prie de ne pas me tenir rancune d’avoir tardé à vous écrire, mais de m’écrire aussi fidèlement que la semaine passée : c’est si bon, une lettre de vous & [qui] me repose tant: c’est ma seule consolation; ne [me la] refusez pas si vous m’aimez.

Votre tout affectueux petit Émery [?]








Jacques Beaulieu
beajac@videotron
Révisé le 22 juillet 2019
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